En 2018, je découvre l’univers startup en rejoignant Partoo (SaaS B2B) en tant que CMO, après 5 ans dans des grands groupes. Je pensais que la création du département Marketing serait la chose la plus difficile, et qu’ensuite tout serait plus simple. En fait, pas du tout.
Derrière, je tombe dans le tourbillon de l’hypercroissance.
En 4 ans, on passe de 20 à 400 personnes, de 2 à 20 millions d’ARR et on se déploie dans le monde entier.
Durant cette phase de Scale, je passe mon temps à construire, casser et reconstruire. Tout est aussi démultiplié : les projets, les interactions et le management d’une grosse équipe. J’étais rarement dans ma zone de confort et j’avais l’impression de prendre l’eau.
Avec un recul d’1 an et demi, je vous raconte les grandes étapes que j’ai suivies, en mélangeant les réussites et les échecs.
- Mon 1er article traite des 12 premiers mois de la création du Marketing chez Partoo. J’y parle de Marketing Opérationnel dans une boite de 20 personnes pour 2 millions d’ARR.
- Celui-ci raconte l’hypercroissance où on arrive à 400 employés et 20 millions d’ARR. Ici on parlera plus de Structuration et Process.
Les 3 grands axes de l’article
- Les 12 commandements pour Scaler le Marketing
- Focus sur 1 gros succès et 1 gros échec
- Le process pour lancer du Marketing à l’international
PS 1 : Partoo recherche actuellement un.e CMO pour prendre en charge l’équipe Marketing composée d’une vingtaine de personnes et viser les 100 millions d’ARR. Et si c’était vous ? Je vous mets ici la fiche de poste à partager autour de vous : Fiche de poste CMO Partoo
PS 2: Ce contenu n’est pas exhaustif et ne s’applique pas forcément à tous les secteurs. C’est un retour d’expérience dans une boîte SaaS B2B où la cible était les Responsables Marketing chez des Grands Comptes
PARTIE 1 : SCALER LE MARKETING
1. Avoir une vision claire de ton département
En juin 2019, après 1 an seul consacré à la Lead Gen, Vincent (le Directeur Commercial) me conseille de montrer la puissance du Marketing et son impact sur les autres départements. Avec lui, je bosse sur un PPT de vision que je présentais aux 2 co-CEO :
- les résultats à date
- ma vision du Marketing pour Partoo
- et les grands chantiers nécessaires pour notre développement
a. Les chantiers en question
Le discours est bien reçu, et ils voient la direction que je veux prendre.
C’est une 1ère victoire !
b. Le plan à 5 ans
Demandé par le fondateur, je fais l’exercice de définir mon équipe et budget Marketing pour que Partoo devienne un acteur mondial en 2025 avec 1 000 employés et 100 millions d’ARR. Travail difficile mais au combien important. Il servira de base pour nos futurs plans Marketing.
–Pourquoi faire des plans annuels dans une période aussi instable ?
Mon passé dans des grands groupes m’a donné cette habitude de préparer des plans annuels. Certes, on ne contrôle pas tout dans une boite en hypercroissance, mais cela te donne une direction et des priorités. Ensuite, les OKR te servent à ajuster trimestre par trimestre (voir le point 4 “La puissance des OKR”).
–Comment préparer son plan Marketing
Phase 1 : Audit
Indispensable de prendre du recul sur son département, et voir ce qui a marché / pas marché. Cela touche autant à la structuration de l’équipe, qu’à des projets de grande ampleur ou des tâches simples.
C’est aussi le moment parfait pour sonder ses pairs, comparer ses process et récupérer des best practices.
Phase 2 : Les enjeux de l’entreprise
Prendre du temps avec le CEO et les Head Of pour connaître les grands enjeux de l’année prochaine.
Phase 3 : Les objectifs Marketing
L’entonnoir que je suivais pour ma présentation était toujours le même :
1. Ma vision
2. Les objectifs
3. Les valeurs qui allaient driver l’équipe
4. Les grands chantiers à mettre en place
5. La structure de l’équipe
6. Timeline + KPI + Budget
Phase 4 : Validation du plan
Présentation Google Slides à mon équipe, puis aux C-Levels
Phase 5 : Déclinaison en OKR sur Monday
Les OKR lancent réellement le plan d’action. On se lançait dès décembre pour attaquer la nouvelle année le plus vite possible. Et on planifiait sur 2 trimestres pour toujours anticiper les projets à venir.
2. Il faut toujours écouter ses pairs
En appliquant religieusement les conseils de mes pairs, ma 1ère année chez Partoo a été un succès. Mais j’ai fait l’erreur de moins me reposer sur eux ensuite.
Voilà la communauté que j’adore avec plus de 100 CMO en startup / scaleup
La construction de mon équipe
J’ai eu beau contacter Geoffrey Vion (Content Square), Selma Chauvin (ex-People Doc), Juliette Hervé (ex-Spendesk) et Anthony Brebion (AB Tasty), je n’ai pas suivi leurs recommandations.
Excès de confiance ? Volonté de faire différemment ? Ou juste une mauvaise appréciation ? Certainement un peu des 3.
Tous me disent de miser très vite sur des profils Seniors et Experts (Marketing Automation, Event, Content) et d’ajouter ensuite du Field International.
Je fais tout l’inverse. Le con !
3. Construire et structurer la bonne équipe
La complexité du Marketing, c’est la multitude d’expertise qui compose ce département. Mes 3 questions: Pourquoi recruter ? Sur quel périmètre ? Quelle séniorité ?
Pour cela, je me suis dit :
- Quels sont les enjeux actuels de la boîte ? → L’expansion internationale
- Quels sont les leviers actuels et performants en Marketing ? → Les Event et le Nurturing
- Quel est mon budget de recrutement ? → Faible, voire très faible
J’ai donc opté pour des stagiaires internationaux qui s’occupaient de reproduire les actions d’Event et de Nurturing sur leurs marchés. Du Field Marketing en soi. Puis, je les ai passé en CDI.
Et je me retrouve rapidement avec l’organigramme suivant :
Quid de l’expertise métier ? J’étais bien sot de croire qu’on pourrait facilement intégrer ça dans notre scope d’actions.
Alors attention : la dimension internationale grâce à cette équipe a été un très gros succès (et j’y reviendrai plus tard). Mais le manque d’experts Métiers nous a fait prendre un retard considérable.
a. La chronologie de mon équipe
C’est vraiment lors de ma dernière année que le département s’est mieux structuré :
- Un pôle d’Expertise : Un membre de l’équipe s’est spécialisé sur le Marketing Automation + un recrutement fait en Content et un à venir en Event
- Du Mid Management : avec une promotion interne sur les marchés dits Matures (félicitations Alessandro) + un recrutement en cours sur les marchés en Expansion
Pour information, je ne parle pas du Product Marketing car il était rattaché à l’équipe Product.
Et je fais un aparté sur les mouvements internes qui sont très bénéfiques : on a accueilli Clément, un ancien Customer Success, qui a fait basculer l’équipe dans une autre dimension. Avoir une personne qui a une connaissance parfaite des Produits et des Clients, c’est de l’or en barre pour le Marketing.
b. Les 4 erreurs que j’ai faites en construisant l’équipe
1. J’ai créé une dette “Marketing”
On parle beaucoup de Dette Technique pour les dev’, mais il existe aussi la Dette Marketing. Quand au bout de 4 ans, tu laisses un département sans expert métier, c’est un sacré retard qu’il faut rattraper.
2. Faible séniorité
J’ai sous-estimé l’importance du mid-management pour me libérer du temps. A partir de 4 personnes en direct, il est temps de prendre un Manager ou un Team Leader.
3. Manque d’anticipation
J’ai eu beaucoup de mal à anticiper le nombre de recrues pendant notre hypercroissance. Dès que je recrutais une personne, il aurait fallu que j’en recrute deux. Ça m’amène au dernier problème.
4. J’étais trop lent à recruter
Recruter c’est long. Et si vous visez des profils Seniors, c’est encore plus long. Plutôt que de faire traîner un recrutement sur des mois, et compter uniquement sur les RH, il vaut mieux se mettre en mode sprint et tout défoncer.
J’ai réussi à le faire pour 1 poste et c’est un bonheur absolu. En gros :
- Se mettre une deadline pour trouver un profil (1 mois par exemple pour un profil junior)
- Communiquer massivement en interne et en externe sur le poste
- Chasser tous les jours 15min sur Linkedin
- Aider les RH tous les jours à faire le tri dans les candidatures
- Donner les questions clés aux RH pour bien faire le 1er filtre d’interviews
- Concentrer au maximum les entretiens sur la semaine
- Débriefer dans la foulée en interne et tenir une scorecard
- Être ultra réactif avec les candidats pour avancer vite sur les étapes suivantes du process
c. Quelle est la place du Management dans tout ça ? Elle est primordiale.
1. L’onboarding
Très souvent négligé dans les entreprises, l’onboarding est la phase clé pour la réussite d’une nouvelle recrue. Nos équipes RH, ainsi que les Head of des autres départements, ont énormément amélioré les process. Notamment en période de Covid.
a. Une partie était gérée par les RH avec :
- les Formations métiers les 2 premières semaines. Tous les C-Levels présentaient leur département et leurs enjeux
- L’accompagnement sur les parties administratifs et équipements (informatique, badge…)
- Un déjeuner + des goodies de bienvenue
b. Et l’autre partie par le Manager. J’avais un tableau sur Monday avec un rétroplanning complet avec les taches à faire avant et après son arrivée.
Une brique Formation :
- L’accès à tous les outils Marketing
- L’accès à tous nos playbooks
- Le plan Marketing
- Les valeurs de notre équipe
- Les ressources Marketing principales (des livres blancs, des cas clients, des replays de webinars)
- Un quizz au bout de 2 semaines pour évaluer ses connaissances sur l’entreprise et nos produits
Une brique Relation :
- Les personnes clés à rencontrer en interne et en externe
- Des cafés et déjeuners avec l’équipe
Une brique Objectifs :
- La liste précise de ses objectifs sur les 4 mois de sa période d’essai.
- Le 1er mois, ça ressemblait plus à une to-do list avec des quick wins + la brique Formation ci-dessus
- Et les 3 mois suivants étaient des OKR avec de vrais projets et des KPI à atteindre. Cela devient une feuille de route tangible pour valider ou non une période d’essai.
2. La gestion de l’équipe
Ma routine était assez simple avec une réunion hebdomadaire le lundi avec toute l’équipe pour présenter l’actualité de l’entreprise, les infos “non confidentielles” venant du Board et les priorités Marketing de la semaine. Puis chacun faisait un tour de table avec les principales taches réalisées la semaine d’avant, et les projets de la semaine.
Ensuite j’enchainais avec les 1to1 de 30min. Chaque personne devait au préalable ajouter des commentaires sur chaque projet dans Monday afin de gagner du temps. Mon rôle était de m’assurer qu’on gardait le cap, et de débloquer des situations. D’ailleurs, une chose importante qu’on oublie souvent en 1to1, c’est de demander “comment ça va ?” et prendre quelques minutes sur la vie perso. La réponse te dira si sa semaine sera facile ou compliquée.
Et pour nos échanges quotidiens, on avait une channel Slack Marketing General, et des channels Marketing par pays.
3. Le suivi qualité
Quand ton équipe grossit, tu dois t’assurer que le degré d’exigence est toujours élevé. D’où l’intérêt de créer des process, des playbooks et délivrer des feedbacks (voir partie 5 “Respecter le PET”). Mais le point sur lequel je veux m’attarder, c’est le feedback. On peut avoir les meilleurs playbooks du monde, il faut s’assurer de les faire respecter. Et donc de répéter régulièrement “Tu t’apprêtes à lancer l’action X, pense bien à suivre les étapes du Process X”.
Le feedback doit se donner immédiatement. Il n’y a pas de temps à perdre. Plus vite il sera partagé, et plus vite on s’assurera que l’erreur ne sera pas répétée le lendemain. Et d’ailleurs, un feedback est aussi un retour positif.
Enfin, plus la communication du Manager aura été transparente et régulière, et plus vite et sans encombre se fera l’évaluation trimestrielle ou annuelle. On nous répétait sans cesse en interne “Le membre de votre équipe ne dois JAMAIS être surpris par votre évaluation”.
4. Valoriser
On pense plus souvent à dire ce qui va mal, que ce qui va bien. Et pire que ça, on manque souvent d’attentions pour récompenser une réussite. Cela passe par :
- Une mise en avant sur un Slack “Grâce au travail de xxxx, on a atteint un résultat de xxx”. Mais on peut aussi laisser la personne prendre elle-même la parole pour qu’elle soit bien identifiée en interne
- Glisser un mot au CEO pour qu’il la félicite devant toute la boîte lors des réunions hebdo d’entreprise
- Accorder du télétravail supplémentaire même s’il déroge à nos règles. On avait des limites de durée et de décalage horaire, mais il m’est arrivé de les faire sauter exceptionnellement
- Les positionner sur des projets stratégiques, comme le lancement d’un nouveau produit
- Leur faire prendre la parole sur un webinar
- Les rendre encore plus autonomes.
- Valoriser c’est aussi défendre son équipe, et nettoyer son linge sale en famille.
- Proposer des progressions pour l’année suivante (Team Leader, Manager, scope international, mouvement interne)
- Et bien sûr l’augmentation de salaire.
5. Alignement sur les objectifs
La construction du plan Marketing (cf : partie 1 “Avoir une vision claire pour son département) et des OKR étaient participatifs. D’un côté, je me chargeais de la “big picture” en discutant avec les C-Levels de Partoo, et avec mes pairs. De l’autre, je notais toujours dans un coin les excellentes suggestions de l’équipe sur les chantiers à attaquer. Après avoir fait cette présentation, je leur laissais 1 mois pour définir le plan pour leur marché, mais aussi des propositions d’amélioration pour le département (outils, process, ou projets). Je m’assurais de trancher pour avoir un plan cohérent à la fin.
PS : je leur accordais aussi des projets “plaisirs”. C’est-à-dire des projets que je n’estimais pas prioritaires voire peu stratégiques, mais dont ils voulaient absolument se charger. Je pense que c’est important que tout le monde prenne du plaisir dans son quotidien.
6. S’amuser avec les teambuildings. Mais pas que.
Je ne suis pas le roi du Team Building, mais il faut en reconnaître sa puissance. D’autant plus lorsque tu fais ça en cross-équipe. Quand tous les mois tu as de nouvelles têtes, que le télétravail t’empêche de rencontrer ces personnes, j’ai rarement vu aussi efficace qu’organiser un verre cross-équipe. C’est notamment une initiative qui fait du bien aux personnes introverties.
Mon constat personnel : tout le monde bosse mieux quand on se connaît. Et si on s’apprécie, c’est encore mieux !
7. Faire confiance quand on ne comprend rien
Quand l’équipe est devenue internationale, il a fallu lâcher prise. Car, comment challenger une personne qui exécute des actions dans une langue que tu ne comprends pas ? Certes, les playbooks et process sont là pour donner un cadre. Les collègues Sales peuvent aussi te faire des feedbacks. Mais un moment, il faut bien faire confiance car tu ne peux pas tout mettre dans Deepl pour checker le rendu.
8. Faire progresser
Comme je n’ai pas la science infuse, ils doivent apprendre auprès des meilleurs. Tout le monde avait dans ses OKR, une obligation de faire 2 calls par trimestre avec des experts, et d’en partager la restitution avec l’équipe.
9. Plan de carrière
Je me suis retrouvé bien bête quand un membre de l’équipe m’a dit “Patrice, pourrais-tu me présenter un plan d’évolution ?”. J’étais à poil. Je n’avais pas anticipé ça.
La chance de l’hypercroissance, c’est qu’elle donne des tonnes d’opportunités : verticales, horizontales, internationales et mouvements internes. En réunion d’équipe, je leur ai présenté l’organigramme du Marketing dans 5 ans, et les pays qu’on comptait ouvrir. En parallèle, je leur ai demandé de réfléchir sur le type de poste préférentiel (au Marketing, un autre département, mais aussi en-dehors de Partoo parce qu’il faut être ouvert d’esprit), me partager leurs motivations et me dire pourquoi ils seraient la personne idéale.
L’entretien se déroule facilement quand le Manager et le membre de l’équipe sont en phase sur l’évolution. Dans ce cas, on se met des paliers d’apprentissage et un timing pour y arriver en sachant qu’on ne maîtrise pas l’avenir. Attention de ne jamais “promettre” un poste. Personne est Madame Irma. Enfin, on alerte le CEO et les RH de ce plan d’évolution.
En revanche, quand on est moins en phase, c’est quitte ou double. Soit tu arrives à faire passer un message qui sera bien reçu “je ne vois pas encore ton potentiel pour devenir Manager d’ici 1 an, en revanche, il existe une étape intermédiaire pour devenir Team Leader et voilà les axes sur lesquels tu dois travailler”. Soit le message ne passe pas du tout et là, tu perds la personne.
4. La puissance des OKR
“Celui qui disperse ses regards sur tout ne voit rien, ou voit mal.” Diderot
a. La dispersion, c’est le diable
Un grand risque pour une entreprise, c’est se disperser. En grossissant, les projets s’accumulent et des silos se créent. Si tu n’as pas un chemin tracé, et la capacité à dire “non”, tu es foutu.
Je trouve que les OKR ont répondu positivement à tout ça :
- Ils donnent une direction et un cadre clair
- Ils te focus sur les projets prioritaires, en mettant de côté ce qui est “non essentiel”
- Les objectifs sont trimestriels et et permettent d’aligner tout le monde
- Et surtout, ils sont très collaboratifs grâce au partage et au suivi des objectifs
b. Mais concrètement ?
Les OKR, “Objectives and Key Results”, définissent des objectifs et des actions concrètes pour les atteindre. Pour définir les priorités, on listait au maximum 4 objectifs par trimestre et 3 à 5 grandes actions pour y arriver.
Attention : il faut être le plus concret et quantifiable possible. Éviter les formulations comme “Améliorer” ou “Optimiser”. Exemple :
Objectif 1 “Générer 100 RDV pour les Sales Worldwide
- Key Action 1 : Scrapper et enrichir le CRM avec 10 000 nouveaux contacts
- Key Action 2 : Lancer une campagne de nurturing pour tous les pays
- Key Action 3 : Organiser 1 webinar avec Google en France, en Espagne et Italie
J’étais vraiment très fan des OKR. Je trouve que ça a amené Partoo dans une autre dimension.
c. Comment cela s’articulait côté Marketing ?
- Un mois avant la fin du quarter, je collectais les enjeux du CEO et des Head of Product, Sales, CS et Ops.
- Je sondais mon équipe pour connaître leurs propres challenges.
- Le Plan Marketing annuel nous servait de base de travail
- On construisait notre roadmap sur 6 mois. Les OKR sont certes trimestriels, mais certains projets Marketing nécessitent du temps avant de montrer des résultats.
- Pré-validation interne avant la réunion officielle. Puis validation officielle lors d’une grande messe avec les Head of
- Enfin, je déclinais les OKR dans notre outil Monday pour avoir une roadmap bien plus détaillée avec une vraie timeline + l’ajout de projets très spécifiques à l’équipe (ex : suivre x formations de la Hubspot Academy)
- Le suivi sur Monday était hebdomadaire lors des 1 to 1
Mon objectif était double :
- Gagner le plus de temps possible pour amorcer les projets Marketing
- Éviter les frustrations des autres départements du type “vous n’avez rien prévu pour attaquer tel ou tel marché”
d. Comment cela s’articulait côté Partoo ?
- Les 2 co-CEO créaient les OKR pour Partoo dans un Google Slides
- Ce fichier servait de base pour tous les départements
- Une réunion de 3h se composait d’une lecture silencieuse des OKR de tous les départements + une session Q&A pour valider officiellement le document
- A mi-parcours, le fondateur demandait un état des lieux à tous les Head Of avec un code couleur (vert = fini, orange = en cours, rouge = bloqué / pas démarré et violet = dépriorisé)
- En fin de parcours, le document était mis à jour par tout le monde. Et les résultats présentés lors d’une réunion avec tous les employés.
Si vous voulez en savoir plus sur la mise en place des OKR, voilà un retour d’expérience complet chez Partoo.
5. Respecter le PET (Process, Exigence & Template)
C’est certainement ce que je détestais le plus : documenter et processer nos projets. Mais c’est tellement puissant.
a. Pourquoi se donner du mal ?
- Rendre la connaissance accessible au plus grand nombre.
- Un RH veut faire un webinar ? Il utilise ton playbook.
- Maintenir un haut niveau d’exigence
- Tu veux écrire un article ? Voilà le process pour que ce soit nickel
- Gagner du temps lors des onboardings
- Rendre les gens autonomes plutôt que de les assister
Cette documentation servait autant à des actions basiques (un post Linkedin) qu’à des projets stratégiques (lancement d’un nouveau produit), voire même de la collaboration entre départements. Par exemple: dès qu’une personne Sales rejoignait l’entreprise, je passais 30min avec elle pour lui présenter le Marketing, son impact et les manières de collaborer.
Exemple de checklist pour un lancement de Produit
b. Que mettre dans cette documentation magique ?
- Process : quel enchaînement suivre et avec quelle timeline
- Playbook : un angle plus tutoriel avec toutes les best practices
- Template : comme les emails d’invitation aux events / les designs de posts Linkedin sur Canva / landing pages Hubspot
Exemple playbook “Organiser un salon”
c. Quand documenter ?
Dès que tu maîtrises un sujet, notamment sur des tâches répétitives, tu écris tout ton savoir en l’agrémentant de vidéos et screenshots. On publiait sur un Wiki Interne, mais Notion est aussi un chouette outil pour ça.
Le réflexe à avoir ? Dès qu’une personne découvre une nouvelle best practice, il faut l’ajouter dans le doc et informer l’équipe.
Si tu n’as pas le réflexe de les mettre à jour naturellement, mets-toi un rappel tous les 6 mois. C’était mon cas.
d. L’importance de bien ranger sa chambre
L’équipe Ops, c’est un peu le parent de tous les enfants. Et je dis ça de la manière la plus positive possible. Je suis très très fan de ce département, et c’est vraiment eux qui ont joué un rôle essentiel dans la phase de Scale (merci Clément B).
Alors c’est très cool d’avoir tous ces beaux templates, mais une chose à laquelle on n’échappera pas : c’est le rangement. Ça passe par :
- Un Google Drive clean
- Des nomenclatures claires
- Des outils bien organisés avec des dossiers et sous-dossiers
Dans notre cas, Hubspot a vite ressemblé à ça.
Et c’est lors d’une réunion avec l’équipe Ops qu’on a décidé de créer une vraie architecture dans les dossiers, et la nomenclature suivante pour nos emails ou landing pages :
- Year_Region_Client type_Action type_Name of action
- 2023_FR_Prospects_Webinar_New Google Features
e. L’exigence par les feedbacks
Le plus grand risque du Scale, c’est la perte de qualité. Avoir des process & playbooks, c’est très bien. Ensuite, il faut les respecter. Il faut donc répéter, répéter et encore répéter les choses pour que ça devienne des automatismes.
On avait une culture du feedback très forte chez Partoo. Et quand je parle de “feedback”, ce sont autant de remarques positives que négatives constructives.
En tant que Manager, ton rôle est d’être le garant de la délivrabilité. Pour cela, il faut rappeler régulièrement les process à l’équipe : “Tu bosses sur un Success Case ? As-tu bien en tête toutes les étapes à suivre ?”
Concernant les feedbacks, ils doivent être immédiats. Les repousser au point hebdo, ou pire la revue trimestrielle, te rajoute à la fois de la charge mentale, mais surtout le risque que l’erreur soit répétée, ou que le souvenir soit flou dans la tête du collaborateur.
Niveau orga :
- Utiliser Slack si c’est une remarque de faible importance
- Se voir en physique ou visio s’il ya besoin d’échanger plus en profondeur
Enfin, l’exigence c’est aussi avoir des KPI clairs à atteindre sur tes actions Marketing:
- un cas client doit attendre x vues en 1 mois
- un webinar doit avoir x inscrits minimum
6. S’outiller au bon moment
Je préconise toujours de commencer de manière manuelle (ou avec un outil vraiment très simple et pas cher) avant de s’outiller pour de bon. Ça permet de faire des tests, de récolter des insights et voir si tu as du ROI.
Ma méthode :
TEST à la mano – ANALYSES – Optimisation – INSIGHTS / ROI – Go ou No pour s’outiller
Dans certains cas, mon erreur aura été de faire durer cette phase trop longtemps. Dire que je suis resté 2 ans avec un outil d’emailing (un plugin pour dire vrai) à 50$ l’année. Dès que tu as du ROI, il faut s’outiller (voire recruter, mais c’est un autre sujet). Quand je parle de ROI, c’est autant du temps gagné pour l’équipe, que de meilleures performances business.
a. Focus sur notre Marketing Automation
- On a commencé de manière manuelle. Ça permet de bien faire son test & learn
- On a mesuré le temps passé sur l’outil et son impact pour la boite. Quand tu scales, il faut tout simplement éliminer toutes les tâches chronophages à faible valeur, et automatiser celles à forte valeur
- Mon plugin d’emailing influençait 50% des Meetings pour les Sales, il était naturel de passer sur une vraie solution de Marketing Automation. Et on a choisi Hubpost.
- Et pour gagner du temps, j’ai copié collé mes campagnes actuelles sur Hubspot. C’est seulement après quelques mois d’utilisation et d’analyse, que j’ai lancé de nouveaux workflows et scoring.
b. Quelques exemples d’outillage :
- Hubspot pour le Marketing Automation
- Google Data Studio pour le tracking du site
- Monday pour le suivi des projets
Exemple de workflow sur Hubspot
c. Attention à la course à l’armement
“Why are we buying faster computers ? Our people already make mistakes fast enough!” J’adore ce message.
En effet, le but n’est pas de s’outiller le plus possible, ni le plus vite possible.
Cette image résume bien mes discussions avec des centaines de startups. J’étais surpris d’apprendre à quel point elles font toutes la même erreur en s’outillant trop vite sur de l’automation Sales ou Marketing. C’est vrai qu’aujourd’hui il existe des tonnes d’outils et c’est tentant d’aller le plus vite possible. Mais la meilleure guitare du marché ne fera pas de toi un meilleur musicien (pas peu fier de cette punchline).
7. Être feignant
A toutes les personnes qui lisent cet article, et qui se considèrent comme des “feignants”, vous êtes mes modèles ! Les feignants sont les personnes les plus malignes que je connaisse. Elles cherchent par tous les moyens à faire plus avec moins.
Kevin Duchier, mon mentor, m’a dit ça lors de notre 1er déjeuner: “Ça sert à rien d’écrire 10 livres blancs d’un coup. Il vaut mieux en écrire 1, en faire 2 ebooks, 10 articles, 1 webinar, du nurturing et de la com’ sur Linkedin. Après ça, tu peux écrire le 2e livre blanc.”
a. Essorer et recycler, voilà ce qu’il faut faire.
Ce qu’il se passait chaque trimestre chez Partoo:
- On écrivait le script d’un webinar
- Ce script se transformait en livre blanc
- Ce livre blanc nous donnait 2-3 articles
- On déclinait ce livre blanc sur les temps forts de l’année. Concrètement, on changeait juste les covers pour faire des éditions spéciales “Black Friday”, “Noël”, “Pâques”, “Soldes”. Et par magie, tu as 4 “nouveaux” contenus
- On les partageait dans nos campagnes de Nurturing + Linkedin
- Et chaque année, on faisait des mises à jour
b. Ne pas avoir peur de radoter…
A tort, on croit qu’on ne peut pas répéter les choses. Qu’on sera identifié comme le vieux Tonton gâteux à Noël qui raconte sans cesse les mêmes histoires. N’oubliez pas que vous ne parlez pas à 10 cousins. Mais à 5 000, 10 000 voire 40 000 personnes. Et que c’est impossible de toucher tout le monde, en même temps et à chaque occasion.
c. …Jusqu’au moment où il faut changer de disque
Cela ne veut pas dire qu’il faut tourner autour de 5 thématiques pendant des années. Une fois l’essorage fini, il est indispensable de se renouveler. Dans notre cas:
- être toujours à la pointe des tendances marché
- verticaliser les campagnes pour être plus impactant
- élever notre posture en parlant aux C-Levels (vs opérationnels uniquement)
- s’appuyer sur des partenaires qui ont des sujets transverses pour du co-marketing
8. Rester simple
Beaucoup de confusions quand on parle de simplicité. Souvent les gens pensent à “simplet” ou “faible impact”. Et c’est totalement l’inverse !
Toujours se méfier de la rivière qui dort.
Pour celles et ceux qui connaissent le personnage Doofie dans Scary Movie, on le prend tous pour “l’idiot du village” et en fait (SPOILER ALERT), c’est le gars qui va nous rouler dans la farine.
a. Pourquoi parler de simplicité ?
Généralement, quand on a une idée, on veut tout faire d’un coup et aller le plus loin possible. Prenons cet exemple tiré par les cheveux :
- Vous n’avez jamais couru de votre vie, mais vous avez envie de faire un Iron Man
- L’Iron Man paraît quand même compliqué. C’est une épreuve qui regroupe 3.8km de natation, 180km de vélo et un marathon. En terme d’entraînement, tu oublies les apéros et Netflix, et tu passes tes soirées à t’entraîner. Enfin, tu dépenses ton livret A dans des équipements (maillot, chaussures, vélo, crèmes, etc.)
- C’est sûr que faire un Iron Man, c’est super impressionnant. Mais peut-être que commencer par un 10km c’est pas si bête que ça non ? Tu vois comment ton corps réagit aux efforts, et si tu arrives à tenir le rythme des entraînements.
- Et l’année suivante, tu testes le semi-marathon. Et ainsi de suite.
C’est comme ça que je voyais mes projets. Alors je me tire la couverture, mais le gars qui me rabâchait tous les jours “Non Patrice, faut faire des choses simples”, c’est Thibault Renouf, mon CEO. Je me suis longtemps demandé s’il ne manquait pas d’ambition, et en fait non. Il avait tout compris.
Tant qu’à parler de Thibault : petit aparté publicitaire où je recommande son excellent livre Start to Scale (et je ne dis pas ça car c’est mon ancien boss…enfin un peu quand même) où il partage toutes ses bonnes pratiques pour mettre en place une stratégie commerciale efficace.
b. Prenons l’exemple d’un lourd chantier de Marketing Automation qui va te nécessiter :
- des mois de boulot en amont pour benchmarker les solutions
- de l’argent pour payer des intégrateurs et/ou agences
- rédiger des contenus
- définir des terminologies et des parcours avec les Sales
- faire rentrer les Ops dans la boucle pour avoir le CRM le plus cohérent
- et surtout, maintenir et analyser cette machine toutes les semaines
Et pourquoi pas juste commencer par 1 seule campagne de Nurturing ? Laisser passer quelques mois et voir les résultats, l’intégration avec le CRM et l’adoption par les Sales. Et ensuite, tu ajoutes tes briques les unes après les autres.
Voilà ce qu’on a fait
- Phase 1 : Création d’une séquence d’emails simple sur un outil bon marché
- J’utilisais le plugin YAMM à 50$ l’année qui envoie massivement des emails. Mais ça reste un plugin manuel.
- La séquence contenait 4 emails envoyés sur 2 mois, puis 1 email par mois
- Un scoring simple : 1 pt par ouverture et 3 pts par clic. A 9pts, c’est un MQL
- Je trackais les KPI et je récoltais les feedbacks des Sales
- Phase 2 : Mise en place d’une solution d’automation plus puissante
- On a lancé Hubpost avec le même système de séquence et de scoring
- L’idée était de commencer simple pour bien appréhender l’outil et tracker les performances
- Phase 3 : Création de workflows plus spécifiques
- Prospects: déclinaison par secteur d’activité et par pays
- Clients: campagnes de crossell
- Phase 4 : Construction de nouveaux dashboards dans Salesforce pour analyser tout le funnel
- Phase 5 : Compléter le Scoring
- C’est là qu’on est tombé dans l’usine à gaz.
- On a ajouté des dizaines de critères : “ s’est inscrit à un webinar” / “n’a pas participé au webinar” / “a consulté la page Tarif du site web” et la barre du MQL a été relevé à 100 pts
- Conclusion : beaucoup moins de contacts tombaient en MQL, donc les Sales se plaignaient. Et nous-même, on ne savait plus comment catégoriser les contacts entre 50 et 90pts sur lesquels les Sales arrivaient à prendre des RDV. Fallait-il malgré tout dire que le Marketing avait impacté ou pas ? C’était le bordel.
9. L’argent fait tourner la tête
Ça sera ma seule prise de position forte sur cet article. Passer 4 ans dans une boite bootstrap (autofinancée) t’apprend à gérer ton argent comme si c’était le tien.
- Tu sélectionnes finement tes projets
- Tu limites le nombre d’outils
- Tu négocies tout comme un crevard. J’adorais dire aux organisateurs de salons “vous savez, on n’a jamais levé d’argent. On est incapable de payer ce montant”
Tout doit avoir un impact !
a. Quelques chiffres
b. Que vais-je faire de tout cet argent ?
J’ai rien contre les startups qui ont levé, mais l’argent leur brûle les mains. Pour leur défense, tu reçois one shot des dizaines ou centaines de millions €, et les fonds te mettent une pression de dingo. Voilà mes 4 observations.
1. Connaître ses besoins
Être très clair sur sa Roadmap Marketing et ses chantiers prioritaires, d’où l’importance de bien bosser son plan annuel.
2. Presta ou pas presta ?
Attention de ne pas solliciter des prestataires (et j’ai rien contre eux, au contraire) alors que les besoins sont encore flous. Pour une collaboration réussie, il faut vraiment se poser sur ses enjeux prioritaires, parler avec des experts pour définir un périmètre, et savoir quoi attendre du prestataire.
3. Vouloir plus
On a fait cette erreur d’ailleurs. On avait l’outil Hotjar qu’on laissait tourner mais qu’on n’utilisait jamais. Heureusement qu’il y avait l’équipe Ops pour nous taper sur les doigts.
→ Payez uniquement les outils que vous utilisez.
→ Si au bout de 3 mois l’outil n’est pas utilisé, il faut soit revoir son organisation et ses priorités, soit se désabonner. Et ça ne remet pas en compte l’utilité ni la puissance de l’outil.
4. Faut-il négocier même si on est plein aux as ?
Oui mon capitaine ! Personnellement je déteste ça, mais c’est indispensable. Notre fondateur nous avait donné un cours de négo qui avait été super utile. Voilà les phrases que j’utilisais le plus auprès des prestataires :
- “Je n’avais pas budgété cette dépense”
- “J’aime beaucoup votre salon, mais j’hésite aussi avec celui-ci”
- “Au vu des montants à engager, c’est peut-être un peu prématuré comme projet”
c. Il est aussi temps d’avoir un vrai suivi budget
Une hypercroissance peut vite cramer votre budget, tant sur les salaires que sur vos projets.
On s’organisait de la manière suivante :
- Le budget RH était centralisé et contrôlé par la Finance
- Le budget Marketing Opérationnel était géré par moi-même
J’ai toujours été très rigoureux sur mon suivi budget grâce à mon passage chez Samsung. Là-bas j’étais incentivé sur le respect de mes forecasts budgétaires.
Avoir un template à disposition
Je pré-remplissais ce fichier sur l’année, et je le découpais en grande famille (Events / Outils / Brand / Acquisition).
- En bleu : les montants déjà validés car engagés (ex: un outil payé sur l’année)
- En jaune : les dépenses provisionnées mais pas encore engagées (ex: un salon pas encore signé)
- En rouge : des dépenses hypothétiques
→ Et chose essentielle : je mettais toujours 10% de côté, pour les dépenses exceptionnelles.
Le process avec l’équipe :
- Ils me soumettaient une dépense
- Je regardais si ça rentrait dans le budget
- Je mettais à jour le code couleur
- Tous les mois, je suivais les dépenses
→ Lors de ma dernière année, j’ai donné une complète autonomie à l’équipe.
10. Le savoir, c’est le pouvoir
En hypercroissance, j’estime qu’il faut être le plus sélectif possible dans ses projets, et surtout, en tirer des insights. Vouloir partir dans tous les sens sous prétexte que vous avez une grosse équipe et beaucoup de budget, c’est comme laisser des diabétiques dans un magasin de bonbons. Ça va mal finir !
→ Il faut : cadrer – sélectionner – tester – mesurer – re sélectionner – amplifier
a. Comment choisir un projet
- est-ce qu’il répond aux enjeux de la boîte ?
- quid de la facilité et durée d’exécution ?
- quel budget ?
- quel impact, et sur quelle timeline : court, moyen ou long terme ? Parler avec des experts métiers si besoin.
Personnellement, je choisissais toujours les projets faciles à mettre en place, avec un impact fort. Et je faisais un mix d’impact à court-moyen-long terme. C’est ça qui m’a drivé toutes ces années.
b. Continuer à aller sur le terrain pour un Marketing à impact
- Dans nos OKR, on s’obligeait à écouter deux fois par mois des RDV Sales & Customer Success
- On s’installait à leurs bureaux pour se nourrir de leurs échanges
- On prenait la parole sur certaines de leurs réunions
c. Améliorer l’existant vs lancer de nouveaux projets
On a passé beaucoup plus de temps à améliorer l’existant et nos KPI (vues / téléchargements / conversion) qu’à lancer de nouveaux projets. Certainement mon côté “plat du pied sécurité” (bonne vieille expression de foot qui veut dire “vaut mieux assurer le coup”).
Je ne suis pas quelqu’un qui prend de gros risques, donc je préfère miser sur ce qui marche. Et au-délà de ça, je trouve qu’améliorer l’existant donne une vraie culture de la gagne. Ne jamais se rassasier de ce qu’on a. Toujours aller plus loin.
On a eu 100 leads entrants ? Visons 150.
d. L’importance de mesurer
Avant de quitter Partoo, j’ai interviewé une vingtaine de CMO pour me remplacer. Ces candidats avaient 10 à 15 ans d’xp et venaient de belles boites. J’ai halluciné à quel point 90% d’entre eux ne connaissaient pas leurs chiffres.
De manière globale, je me rends compte à quel point les gens préfèrent lancer des projets que les analyser. Quand tu Scales, tu dois comprendre ce qu’il se passe dans ton département, savoir où le bât blesse, et te focaliser sur les projets à fort impact. Et pour ça, faut connaître tes datas.
De mon côté, j’ai toujours été très “chiffre” et j’aime comprendre ce qui marche / ce qui ne marche pas.
- Quand ça marche : il faut appuyer encore plus fort. Chez nous, c’était le Nurturing et les Webinars.
- Quand ça ne marche pas : tu le mets de côté, et tu reviendras plus tard avec une nouvelle proposition, comme le Paid.
Pour cela, on a créé de nombreux dashboards sur DataStudio (pour suivre les performances du site), Hubspot (pour nos campagnes de nurturing et landing pages) et Salesforce (pour l’impact business).
–> Au début, je passais 1 journée entière par semaine à analyser. Puis une demi-journée quand on était un peu plus rôdé. Et à la fin, je jetais des coups d’œil quotidien, en m’appuyant sur des analyses au cas par cas faites par l’équipe.
Enfin, tu partages tous ces insights en interne. Par exemple :
Opérationnel
- Le site web à un taux de conversion visiteurs / demandes de démo de 4%
- Notre taux d’ouverture moyen par pays pour nos prospects : 30% en France, 40% en Italie, etc.
- Note de satisfaction des webinars : 4.7/5
Business
- Le site Web avait la meilleure conversion de lead à signature (75%), le cycle de vente le plus court (moins d’1 mois) mais le panier moyen le plus faible
- Le Nurturing était le plus gros générateurs de RDV pour les Sales (50% des RDV)
- Le webinar avait une forte influence sur le closing des deals (35%)
- In fine, le Marketing avait un impact à hauteur de 20% de l’ARR total
Grâce à ces infos, tu gères ta roadmap Marketing, ton budget et tes ressources humaines pour amplifier les leviers à fort impact.
11. Toujours avoir faim
Ce n’est pas parce que tu es dans une boîte de 400 personnes que tu dois te reposer sur tes lauriers. Il faut conserver ton ADN. Ce qui a fait ton succès.
- Les Salons : on se jetait sur tous les gens qui passaient devant notre stand
- Linkedin: on informait les Sales sur les nouveaux followers et les prospects intéressants qui likaient nos posts
- Incentive : on lançait des challenges aux Sales pour dépasser le nombre d’inscrits à nos webinars. Et les gagnants avaient une bouteille de champagne.
- Ne pas tout miser sur l’Automation : on gardait encore pas mal d’actions manuelles sur la prospection pour être le plus chirurgical possible
- Et on cherchait constamment à améliorer nos KPI de vues, de téléchargements, de MQL, de conversion…
12. Communiquer, encore et toujours
Au départ, le Marketing est toujours incentivé sur la génération de leads. Il y a donc une relation forte qui se crée avec les Sales.
a. Naviguer dans les organisations
Plus tu grossis, plus le Marketing devient transverse et a l’obligation d’interagir avec d’autres départements.
- Customer Success : rétention client et crossell
- Product : lancements de produit
- RH : image Corporate
- Ops : process et gestion des outils
- Stratégie : lancement de projets de grande ampleur
- Finance : gestion des dépenses et ROI marketing
Cela peut passer par des points mensuels ou trimestriels avec les Head of de chaque département, et en s’appuyant sur des membres de ton équipe qui collectent ces infos. C’est le meilleur moyen pour collecter les infos et anticiper les OKR.
C’est une chose que j’ai particulièrement apprise grâce à mes expériences dans des grosses boîtes. L’effectif est tellement gros et les projets tellement transverses, qu’il faut aller vers les gens. Sinon, ça t’amène vers des gros conflits “j’étais pas au courant du projet X”, “tu aurais dû nous mettre dans la loupe de Y”, “on n’a jamais su si cette action avait marché”.
La confiance des gens est longue à obtenir. Mais elle est très rapide à perdre.
Et je trouve que le télétravail est venu compliquer ça (mais c’est un avis personnel).
b. Enfin, il faut sur-communiquer
C’est une période où les gens peuvent devenir plus politique et tirer la couverture sur eux. Parfois volontairement, et parfois par simple oubli de remercier les gens qui ont participé.
Il est donc essentiel de communiquer à outrance, et de toujours embarquer les gens. Car les succès ne sont plus individuels, mais collectifs.
- Communiquer sur les projets à venir : pour éviter toute frustration de ne pas avoir été mis au courant
- Communiquer sur les projets en cours : des slacks ou emails sont très bien pour ça
- Communiquer sur les résultats des projets : car le Marketing s’appuie sur de nombreuses équipes et qu’il est indispensable de leur montrer le fruit de leur travail
Niveau orga, ça donnait:
- Points toutes les 2 semaines avec mon CEO
- Points mensuels avec les Head of Sales par pays
- Points trimestriels avec les Head of Product + CS + Ops
- Des emails pour mettre en avant des gros projets
- Des slacks individuels ou sur des channels avant / pendant / après un projet en taggant les personnes qui avaient fortement contribué
- Les réunions hebdos avec toute l’entreprise pour faire passer des messages clés
- Et surtout, ce que je préférais : aller voir les gens spontanément quand on était au bureau
Si vous êtes encore là, vous avez droit à une pause pipi.
PARTIE 2 : LES PROJETS MARKETING QUI ONT CARTONNÉ ET ÉCHOUÉ
Je ne vais pas lister tous les projets, mais me concentrer sur 1 projet Marketing qui a eu le plus gros impact, et 1 qui a le plus foiré.
Le succès : Le Baromètre Client générait 70% des RDV pour les Sales
Ce projet avait pour 1er objectif la satisfaction client. A la fin, c’est devenu une action 360° qui touchait à la notoriété, la lead gen, la rétention et le crossell client.
C’est aussi un projet qui regroupe pas mal de principes d’un bon Scale :
- De manuel à automatisé
- Essoré, recyclé et renouvelé
- Internationalisé
- Fort impact et ROI
Le game changer : on avait accès à la data de nos clients, et surtout de la data non confidentielle. Voilà la chronologie :
En 2018
- Création d’un baromètre basé sur les avis clients publiés sur les fiches Google. Concrètement : “Quelles sont les entreprises avec le plus d’avis ? Leur note moyenne ? Leur taux de réponse ?
- Tout est manuel et on bosse 2 semaines non stop avec un data scientist (qui a fait un boulot énorme, merci Antoine) et un designer qui transforme la citrouille en carrosse (merci Matthias)
- On a le GO du média le JDN pour le publier en exclusivité
C’est un succès ! On a un gros média qui publie gratuitement, et nos clients qui sont ravis d’apparaître dans notre classement.
En 2019 : on essore et on recycle
- On met à jour l’étude et on fait 1 livre blanc + 1 webinar
En 2020 : on prend notre envol
Internationalisation :
- On lance l’analyse sur 2 nouveaux pays, l’Espagne et l’Italie, pour qui on obtient aussi des articles gratuits dans la presse locale
Récompense pour les clients :
- un certificat d’excellence en e-réputation
- une boite de chocolats + un mot du Customer Success qui les félicite
L’équipe Product:
- Elle crée une 1ère version MVP pour intégrer des données du baromètre sur l’App.
Les clients sont aux anges et ça commence à se tirer la bourre avec des emails du type “Quand est-ce que vous publiez la nouvelle édition ? Cette fois-ci on vise la 1ère place”
En 2021 : une dimension au-delà du Marketing
Notre Chief Product Officer craque le système (Savinien, tu es notre roi) et développe un outil de scrapping pour étoffer nos études avec les données des prospects. On passe donc d’une simple étude clients, à une véritable étude marché, complète et verticalisée sur 12 secteurs.
Cet outil nous propulse au-delà du Marketing :
- 12 présentations commerciales voient le jour pour les Sales (merci Alexis !)
- 12 études à disposition des Customer Success pour leur crossell
- 12 webinars verticaux sur 2 semaines
- En parallèle, les données clients sont définitivement intégrées dans l’App Partoo et chaque user peut suivre en live les performances de ses établissements
En 2022 : c’est l’apogée
Notre Data Analyst (coucou Julien) crée un formidable Data Studio qui automatise tout ça. On a maintenant accès à un outil qui lance les études sur n’importe quel secteur et n’importe quel pays en 1 seul clic.
On en profite aussi pour monter en gamme et organiser des events physiques avec remise de prix.
Conclusion
Après 4 ans, les retours du marché sur le Baromètre prennent une ampleur considérable ! Pour la dernière édition, on a carrément le DG d’Audi France et le CEO de Leroy Merlin Italie qui publient les classements sur Twitter et Linkedin.
Et niveau business : parmi tous les RDV pris par les commerciaux sur les actions Marketing, 70% venaient de ce projet. C’était énorme.
D’autres exemples de succès :
- Le nurturing via Hubspot qui influençait 50% des meetings pour les Sales. Des séquences d’emails très doux qui poussaient des contenus qui répondaient aux plus gros pain points des prospects. On prenait une position de conseiller, jamais de commercial (on ne proposait pas de RDV)
- Les webinars qui avaient un taux de satisfaction très élevé (4.7/5) et qui étaient les plus gros influenceurs de nos signatures. Une présentation de 20min et 40min de Q&A pour apporter le plus d’impact. Des webinars non commerciaux, uniquement basé sur le conseil et l’expertise
- Les articles de presse gratuits tous les trimestres. Faut bien cibler les journalistes, les contacter personnellement sur Linkedin, et leur proposer des exclusivités sur des contenus à forte valeur (cas clients, études)
- La puissance de Linkedin pour l’image corporate et l’acquisition. Les candidats et les prospects pensaient toujours qu’on était une boite 10x plus grosse grâce à notre activité sur Linkedin.
- Notre étude consommateurs qui nous a positionné comme Expert sur le marché. Les chiffres ont alimenté toutes nos présentations commerciales et nos prises de parole.
Le foirage : le SEO
Aaaah le SEO. Là j’ai bien déconné. Comment je l’ai su ? Le jour où un Sales m’annonce “Patrice, mon prospect dit que notre produit, Le Presence Management, apparaît en 2e page des résultats Google”.
OUPS!
Avec du recul, je me rends compte que j’ai créé une véritable “dette marketing” avec le SEO. Il leur a fallu 1 an après mon départ pour revenir dans le Top 4.
La chronologie :
- 2018 : site web créé par un freelance tech. Aucune optimisation SEO, aucun outil de tracking, beaucoup de robots qui remplissent nos formulaires (notamment des robots qui voulaient notre corps) et aucune visibilité sur les demandes entrantes
- 2019 : je migre notre site sur WordPress, et je me renseigne sur toutes les best practices SEO. J’accouche d’un playbook sur les meilleures guidelines pour rédiger un article (mots-clés / taille des images / meta description etc.) Et en quelques mois, on voit l’impact sur les leads entrants.
- 2020 / 2021 : je ne regarde qu’une seule chose : le nombre de demandes de démo. Ça augmente tous les mois, et tout le monde est content. Le poids du site Web dans le business généré par le Marketing est affolant: il passe de 2% à 20% en 3 ans.
JE SUIS LE ROI DU MONDE !
ET PUIS, C’EST LA DOUCHE FROIDE
- 2022 : ce fameux Sales qui me dit “Patrice, notre produit apparaît en 2e page”. J’avais laissé tomber le tracking de nos pages produits, et notre visibilité sur nos mots-clés. Et comme nos concurrents ont les mêmes noms de produits, c’était critique d’apparaître en 1ère position.
Pourquoi cet échec?
- Je trouvais suffisant notre production de contenu, 2 à 4 contenus par mois tout en respectant les principales guidelines SEO, et le nombre de leads entrants.
- Mais j’ai sous-estimé le périmètre large du SEO et son impact. J’aurais dû avoir une stratégie globale. C’est clairement un job d’expert à temps plein, et il aurait fallu recruter ou passer par un prestataire.
Mon REX : le SEO est un chantier à mettre en place dès que possible en suivant les bonnes guidelines. Dès que vous avez le budget, il faut internaliser ou vous faire accompagner par des experts. Et contrairement aux idées reçues, il existe des Quick Wins en SEO. Donc ne repoussez pas ce projet.
→ Pour de bons tips SEO, je vous recommande ces 3 articles “Les secrets de la stratégie SEO de Matera”, “Les 20 règles du référencement Google” et Comment multiplier son trafic par 3 en moins d’un an”.
D’autres échecs :
Je peux en citer beaucoup, car manquant d’experts métiers, on n’a pas tiré le maximum des actions qui fonctionnaient bien (Marketing Automation, Events, Marketing Client), et on n’a pas rectifié le tir sur des actions qui nous échappaient (SEO, Content, Paid). La fameuse dette Marketing.
PARTIE 3 : INTERNATIONAL MARKETING
Pour savoir comment choisir un marché, adapter son produit et ouvrir un bureau, je vous recommande cet article. De mon côté, je me concentre sur le Marketing Opérationnel et les 5 étapes que je suivais à chaque ouverture.
1. Explorer tes marchés grâce à 4 leviers
a. Notre actionnaire
On avait la chance d’avoir un actionnaire, le groupe Webedia, qui a des filiales dans le monde entier. Lorsqu’on décide d’attaquer le Mexique, j’appelle leur CMO qui m’apprend des choses géniales comme :
“Le pays est sous-équipé en solution comme la vôtre. Mais comme ils suivent les tendances aux Etats-Unis, ils ont une forte maturité sur le sujet. Il faudra donc les aborder sur le ton de l’expertise et des tendances.”
→ Ce qui est complètement l’inverse des pays européens où on les abordait avec les principes de base.
b. Les partenaires
Un gain de temps énorme. Si ton partenaire français est aussi implanté en Espagne, tu as juste à lui demander :
- quelle est la maturité du marché
- les acteurs en place
- les meilleurs salons
- les leviers marketing les plus performants dans ce pays
c. Mon réseau
En parlant régulièrement à tes pairs, et en rejoignant des communautés Slack, tu connais forcément des boites qui se sont exportées. C’est comme ça que j’ai pu parler avec le Country Manager de Toucan Toco aux US.
d. Business France
Alors, il y a à boire et à manger. Mais ils sont d’une très bonne aide pour te mettre en relation avec des startups, ou pour obtenir des discounts sur des salons.
Bonus : le Paid peut être un excellent moyen de comprendre ton marché. On ne l’a pas fait car je n’avais pas le réflexe à l’époque.
2. Préparer les bases
Un peu téléphoné comme gif.
- Scrapper et enrichir le CRM avec l’aide de notre Growth Hacker. On commençait par des bulks de 1 000 contacts
- Traduire le site web. On s’est longtemps posé la question de le laisser en anglais. Mais chez Partoo, on croit beaucoup à la force du local. Que ce soit dans les recrutements ou les actions Marketing. Donc quitte à bien attaquer un marché, autant traduire le site web. Pour que ça ne revienne pas cher : traduction globale dans Deepl + relecture et correction par un Sales local.
- En ce qui concerne les contenus, on traduisait les 4-5 articles qu’on estimait les plus pertinents pour ces marchés. Attention, on faisait de la localisation, et pas de la traduction simple. C’est-à-dire qu’on adaptait les exemples et les screenshots au pays.
Petit aparté : j’ai beaucoup testé de freelances et d’agences pour les traductions. Et les Sales n’étaient jamais contents. À juste titre. C’est vraiment pas facile d’avoir une personne qui traduit dans les règles de l’art, et qui comprend bien votre industrie. C’est pour ça qu’on a beaucoup traduit en interne. On a même fini par recruter 1 traductrice.
3. Actions spécifiques ou duplicata ?
Tant que tu n’as pas de Ressources Humaines, il faut dupliquer ce qui aura le plus d’impact. De notre côté:
- Nurturing : intégration des contenus traduits dans nos campagnes de Marketing Automation
- Webinar : traduction de nos PPT + webinar en propre (pas grave si tu n’as que 5 participants, c’est déjà génial)
a. Je fais un petit focus Webinar, car on a vraiment mondialisé cette action.
- Chaque trimestre, on ciblait une semaine pour faire 9 webinars sur 9 marchés
- C’était la même thématique, et donc le même PPT (qu’on traduisait pour chacun des pays bien sûr)
- Cette semaine globale était parfaite pour créer une forte émulation en interne
b. La participation aux Salons
On a eu des résultats mitigés sur les salons à l’international. Je préconise de ne pas les lancer dès l’ouverture d’un pays, mais d’attendre quelques mois pour bien comprendre les besoins et la maturité du marché. Avoir du pipe facilitera aussi la prise de contact en amont du salon.
Quel type de salon choisir ?
Les salons très spécialisés sur votre thématique et à taille humaine ont plus de chance d’aboutir à des rencontres intéressantes. S’il est possible de booker des RDV 1to1, c’est encore mieux.
Concernant les salons à plus grande ampleur, ils peuvent avoir du sens si votre stand est très bien placé, et si vous bénéficiez d’un fort discount pour ne pas payer le prix fort. Business France (selon les pays) offre des packages très attractifs.
Quel ROI espérer ?
De mon expérience et sur une cible Grands Comptes, un salon apporte rarement un ROI direct et rapide. En revanche :
- pour un nouveau marché : il sera riche d’enseignement, et en prise de contact prospects et partenaires
- pour un marché avec une présence de plus d’un an : la prise de RDV sera plus facile et importante
c. L’importance des Sales
Avant de parler du recrutement dans l’équipe Marketing, je veux parler d’une relation importante. Celle avec les Sales. A la conquête d’un nouveau marché, ton Sales se retrouve seul et a besoin d’aide. C’est le meilleur moment pour 1. l’onboarder sur l’apport du Marketing, 2. obtenir son aide pour te soulager (ex : traduction de contenus, sélection des salons, etc.). C’est un véritable duo qui se forme, et qui sera formidable lorsque tu auras du Marketing Local.
4. Recruter du Field International pour passer dans une autre dimension
Il y a toujours de l’incertitude quand tu attaques un nouveau marché. Même quand tu commences à avoir de la traction et des premières signatures.
a. La règle qu’on suivait en théorie :
- Quarter 1 : 1 Sales prospecte un marché. Et en bonus (selon la priorité du marché ciblé), le Marketing lance quelques actions de base comme la traduction site web et contenus
- Quarter 2 : On amplifie les actions avec du Nurturing + Webinar
- Quarter 3 : On débloque du budget pour recruter et on lance des actions locales
- Quarter 4 : Selon les résultats, on envisage 1 salon
→ Dans la réalité, ce n’était pas aussi rigide. En fonction des performances commerciales ou des opportunités, on accélérait cette chronologie.
Pour limiter les risques du recrutement, on a beaucoup opté pour des stagiaires locaux, mais basés à Paris (sachant qu’on avait des bureaux à Barcelone, Mexico, Sao Paulo et Mumbai). Quand un marché était vraiment validé, on recrutait en CDI.
b. Recruter un stagiaire local, c’est très facile.
Ils font un semestre d’étude à Paris, et ils rencontrent des grosses difficultés à trouver un stage car ils ne parlent pas bien français. Donc le choix est vaste, et il y a peu de concurrence.
Pourquoi un local et pas un bilingue ?
Je préfère largement un espagnol qui ne parle pas français, plutôt qu’un français bilingue espagnol. Je donne toutes les raisons dans la sous partie d. “Rien ne vaut un local”.
Quel ROI?
Franchement, le ROI est incroyable. 6 mois de présence pour 1 000€ mensuel, le travail abattu est monstrueux : traduction du site Web, rédaction de contenu, création et gestion des webinars et des campagnes de nurturing etc. Et de leur côté, ils sont ravis des responsabilités et des possibilités d’embauche.
→ Mais si votre marché est “confirmé”, et que vous avez le budget pour recruter des CDI expérimentés, c’est encore mieux.
c. Pourquoi les recruter à Paris, et pas dans nos autres bureaux ?
- Avoir le maximum de connaissance sur notre activité grâce à toutes les ressources à leur disposition
- Avoir un véritable sentiment d’appartenance pour les embaucher derrière. Ce qui s’est réalisé 90% du temps dans mon département.
d. Pour avoir un fort succès un marché, rien ne vaut un local.
- Il parle la langue comme un natif (CQFD). Phrase bête, mais ton bilingue fera des petites erreurs, c’est ce qu’on voyait dans de la traduction notamment. Ton bilingue peut être aussi bien meilleur à l’oral qu’à l’écrit, et tu te fais rouler dans la farine lors des entretiens.
- Il connaît son pays, sa culture, ses habitudes. C’est son gros avantage !
- Exemple pour l’Italie “Olala tes emails sont beaucoup trop formels”
- Exemple pour l’Espagne: “Pour organiser un event, faut le faire le soir avec des bières et des tapas. Si c’est le matin, personne ne viendra !” (merci Patricia)
- Exemple pour l’Inde où Nithin m’informait sur les fêtes indiennes qui méritaient de créer des campagnes dédiées pour nos prospects
- Je trouvais que la relation avec les Sales était bien meilleure. Tout était plus fluide.
e. La beauté du télétravail
C’était mon intérêt qu’ils passent quelques jours ou semaines dans leur pays pour rencontrer des clients, des partenaires et surtout passer du temps avec les Sales.
→ Et comme je suis quelqu’un qui croit beaucoup à la force du terrain, c’était plus que recommandé de faire ça.
→ Tu leurs donnes aussi la possibilité de voir leur famille et leurs amis, sans devoir poser des congés.
f. Recrutement dans d’autres bureaux
Au bout de deux ans, j’ai recruté des personnes directement dans notre bureau de Barcelone, qui servait de Hub pour l’Espagne, l’Italie et le Portugal.
Pourquoi ? Car l’entreprise était de mieux en mieux structurée sur les onboardings, notamment pour les personnes qui ne parlaient pas français. Et le bureau de Barcelone commençait à devenir conséquent avec une vingtaine de personnes (quand je commence à recruter là-bas).
5. Enfin, on lance des actions locales
Le Field Marketing avait la responsabilité de son marché. C’étaient les experts.
a. Comment on s’organisait ?
- On avait des channels slacks par pays: Sales + Marketing
- Je faisais des points mensuels avec les Country Managers
- Les membres de l’équipe participaient activement aux réunions Sales hebdo + points réguliers avec les Country Manager
- Je définissais la stratégie Marketing globale et nos chantiers prioritaires, et chaque Expert Marché faisait sa propre tambouille pour son marché. Généralement, 80% du plan global était repris, et 20% s’orientaient sur des actions locales.
b. Les actions génériques pour tous les marchés
- Gagner en notoriété le plus vite possible. Pour cela, les Sales mettaient des clauses dans les contrats pour faire des cas clients. Je prends un exemple où pour le Brésil (merci Luciana), on a publié “Havaianas a choisi Partoo pour booster sa visibilité en ligne”. C’était ÉNORME !
- Avec ces cas clients, on tapait à la porte de tous les médias pour obtenir des articles gratuits en échange d’une exclusivité. Ils disent OUI tout le temps. On avait en moyenne 1 article gratuit par marché et par trimestre.
- Entrer en contact avec les partenaires pour du co-marketing.
- Se référencer sur les plateformes de comparaison G2 et Capterra qui sont très connus à l’étranger, et qui te font gagner très vite en crédibilité
- Linkedin: page par pays ou page globale ? On a fait les 2.
- Au départ, ce fut forcé à cause de notre nom. Partoo dans les pays hispanophones = “accouchement”, on avait donc opté pour “Localoo”. Je vous laisse imaginer les résultats de recherche sur Google ou Youtube quand on tapait “Partoo”. On a donc créé des pages Partoo, Localoo et Partoo Italia
- Mais lorsqu’on a commencé à grossir et à être de plus international, c’était un enfer à gérer toutes ces pages Linkedin. D’autant plus qu’elles n’ont pas autant de fonctionnalités que la page mère.
- La meilleure nouvelle, c’est lorsque la boîte a finalement remplacé Localoo par Partoo sur tous les marchés. Cela a été un soulagement pour tout le monde.
- Le seul hic d’une page globale : pour publier un post sur un marché cible, il faut un minimum de 300 followers. Notre réponse : faire des sprint avec les Sales pour inviter un maximum de prospects pour atteindre ce nombre.
- Juste pour rappeler la force de Linkedin : en annonçant la signature d’un client en Arabie Saoudite, son concurrent nous contactait dans la foulée et on le signait 1 mois plus tard
c. L’effet de levier des partenaires
Quand on pense international, on pense aux partenaires locaux. Mais il existe quelque chose d’encore plus puissant : c’est le partenaire français (ou de ton marché principal) qui est implanté dans d’autres pays. Meilleure sera ta relation depuis la France, et plus vite et plus loin tu iras avec lui. C’est un peu cliché de dire ça, mais je m’en suis vraiment rendu compte.
Voilà un exemple avec Waze :
- Grâce à notre CEO, on fait un webinar avec Waze France et un client commun. C’est un véritable carton
- Derrière, je demande des mises en relation avec leur filiale italienne, et on réplique le webinar. C’est encore une réussite
- Ensuite, ils ouvrent les vannes et nous mettent en contact avec Waze Espagne, Waze Benelux et Waze LATAM
Alors c’est vrai qu’il s’agit d’un partenaire mondialement connu, mais c’est aussi le cas pour des entreprises de la taille d’un Partoo. Nombreuses étaient les boites comme Skeepers ou Lengow avec qui on a répliqué nos actions dans plusieurs pays européens.
d. Comment se définissent les actions purement locales ?
- maturité du marché
- paysage concurrentiel
- besoin exprimé par les Sales
- spécificités culturelles : cela se traduisait par des campagnes saisonnières (Diwali en Inde, Aïd au Moyen-Orient etc.).
Bref, je recommande fortement d’avoir du Field International dans son équipe. Cela a été un vrai tremplin pour nous.
e. Pour finir en douceur, des insights rigolos sur l’international
- Linkedin Ads: on avait des performances excellentes au LATAM, satisfaisantes en Italie et Espagne, et pourries en Europe Centrale / Nordics et Moyen-Orient.
- Landing Pages : on explosait les scores en Inde. On pensait être les Rois du monde. Mais en fait, quand les Sales les appelaient, personne n’avait lu nos livres blancs…
- Emailing Prospects : taux d’ouverture énormes en Espagne et Italie (+ de 40%) avec des gens qui te répondent à chaque fois “Merci pour cet email, c’était très intéressant”. En France, on a dû nous remercier 2 fois en 4 ans.
EPILOGUE
J’ai mis du temps à écrire cet article car j’estimais ne pas avoir amené le département Marketing là où je le souhaitais. Finalement, en retraçant ces 4 années, je me rends compte que le bilan est bien plus positif que ce que j’avais imaginé. Ecrire a vraiment été libérateur.
Voilà, j’espère que cet article vous aura plu, et surtout qu’il vous aidera.
Pour info, Partoo cherche un.e CMO pour atteindre les 100 millions d’ARR. Et si c’était vous ?
Pour rappel, voilà les 11 12 commandements du Scale.
1. Faire des choses simples. La complexité c’est le diable
2. L’argent rend bête, donc utilise-le comme si c’était ton livret A
3. Toujours parler à ses pairs, ils disent des choses sensées les bougres
4. Ne pas se disperser. La dispersion c’est le diable.
5. Le recrutement, le facteur X
6. Les OKR, c’est voir la vie en couleur
7. Essorer et recycler. Vive les écolos
8. Automatiser ce qui est automatisable
9. Process + playbook. Rembobine et recommence
10. Communiquer massivement en interne. Parce que les gens doivent savoir
11. Ne jamais être rassasié
12. Et toujours analyser pour comprendre. C’est bien de comprendre