Nous sommes bien loin des premières fresques publicitaires de l’Antiquité. La publicité évolue au rythme des avancés technologiques, et donc des nouveaux usages. L’écosystème marketing et publicitaire s’est largement diversifié et les possibilités d’atteindre une audience se sont multipliées.
Alors que la publicité se limitait à des campagnes sur la presse, la radio, la télévision et l’affichage extérieur il y a encore quelques années, l’avenue du digital a permis de démultiplier les leviers de communication… Mais aussi d’en créer de nouveaux tels que les réseaux sociaux, les moteurs de recherche, les sites web et applications mobiles. Ces dernières années ont également été marquées par l’automatisation. C’est là que la publicité programmatique intervient.
Le programmatique : de quoi parle-t-on ?
Programmatique, publicité programmatique, achat programmatique : il est parfois compliqué de cerner ce que c’est. On parle d’automatisation des achats et des ventes d’espaces publicitaires.
Mais donc le programmatique est une automatisation ? Une technologie ? On veut du concret !
Plus globalement, je définis le programmatique comme un écosystème d’acteurs et de technologies (AdTech, MarTech) qui permettent d’acheter ou de vendre des espaces publicitaires de façon la plus automatisée possible.
Quelques précisions
Chaque expertise vient avec son jargon et son lot d’acronymes… Voici quelques éclaircissements.
DSP : Demand Side Platform
Outil qui permet aux annonceurs d’acheter des espaces publicitaires ouverts au programmatique.
Principaux DSP : DV360, Xandr, The Trade Desk, Hawk, Amazon DSP
Trading Desk
Agence spécialisée en achat programmatique. Elle est aujourd’hui souvent directement intégrée dans une agence plus globale.
SSP : Sell Side Platorfm
Plateforme qui permet aux éditeurs de monétiser leurs espaces publicitaires via le programmatique.
Principaux SSP : Google Ad Manager, Magnite, Xandr, FreeWheel
Ad Exchange
Place de marché virtuelle où l’offre (SSP) et la demande (DSP) se rencontrent. Les impressions sont pour une majeure partie achetées en enchères. C’est ce qu’on appelle le RTB pour Real Time Bidding, c’est-à-dire enchères en temps réel.
Exemple d’exchanges : Google Ad Exchange, AdYouLike, The Monetizer, Media Square.
Mais ce n’est qu’une partie de la définition. Voyons plus en détail en quoi le programmatique est une véritable disruption par rapport à la publicité d’avant, en gré à gré.
PS : vous aurez remarqué que j’ai réussi à caler le mot “disruption”.
Le programmatique : Quelles valeurs ajoutées ?
1. Achat et vente d’espaces publicitaires automatisés
Les éditeurs et les annonceurs peuvent s’équiper des plateformes technologiques qui leur permettent d’acheter ou de vendre des espaces publicitaires sans pour autant avoir à échanger par mail ou par téléphone – comme cela peut être le cas pour des opérations en gré à gré. Cela se fait généralement sous forme d’enchères où l’annonceur qui bid (= poser une enchère) le plus fort remporte l’impression.
Vous souhaitez cibler les panneaux digitaux situés dans les quartiers d’affaires en France ou à l’étranger ? Plus besoin de faire un travail de recherche monstrueux sur les régies pour dealer avec eux. Des DSP vous permettent de diffuser en moins de 24H où vous voulez.
PS : On voit souvent des opérations de communication sur LinkedIn en annonçant que sa marque arrive en TV ou dans le métro à Paris. Rien d’un exploit : c’est plutôt simple à activer depuis ces plateformes 😉.
La stratégie et la mesure sont moins évidentes. C’est là où l’agence peut généralement vous aider.
2. Facturation annonceur/éditeurs automatisée
On oublie trop souvent la valeur qu’apporte le département Admin/Finance pour votre entreprise. Pensons à eux et faisons leur honneur dans ce deuxième point !
Dans un modèle en gré à gré, il convient de signer ce qu’on appelle un Ordre d’Insertion (OI) pour contractualiser une opération publicitaire avec un éditeur (ou une régie). Mais imaginez que vous devez répéter l’opération pour chaque site que vous souhaitez cibler.
Grâce au programmatique, l’annonceur ne règle qu’une facture au DSP. Ce dernier se charge ensuite de redistribuer la valeur à tous les publishers (sites/app par exemple) sur lesquels vous avez diffusé des publicités.
Le gain de temps est phénoménal pour tout le monde.
3. Capacités de ciblage ou d’exclusion avancées
Avant que tous les acteurs soient connectés, les possibilités en termes de ciblages étaient bien limitées. La diffusion des publicités sur des sites avec une thématique commune était ce qu’on pouvait faire de plus fin.
Aujourd’hui, nous pouvons trouver trois grandes typologies de ciblage.
Ciblage Média. Il est possible de cibler une liste de sites (whitelist) selon l’audience
que vous souhaitez atteindre. Vous pouvez même choisir à quelle position votre annonce doit s’afficher sur le site : plutôt en haut, milieu de page ou bas de page.
Ciblage Sémantique. Ces dernières années, des acteurs technologiques sont apparus sur la scène programmatique pour offrir aux annonceurs la possibilité de cibler des articles qui traitent d’un sujet, d’un contexte bien précis. Ils vont pour cela analyser différents paramètres tels que l’URL du site et le contenu texte et image des articles pour déterminer le contexte de l’article.
On va ici parler de ciblage cookieless voire même consentless puisqu’il n’est pas basé sur l’utilisateur. Une alternative puissante face à la dépréciation des cookies tiers.
Ciblage Data. L’or noir comme on l’appelle. Les géants du web ont construit leur empire en partie sur les données utilisateurs. Que ce soit à travers les données propriétaires de l’annonceur (CRM, données offline, log sur site et app…) ou encore via des data providers (fournisseurs de données), les capacités de personnalisation du message sont aujourd’hui très poussées.
Exclusion
Nous avons jusqu’ici parlé de ciblage. Mais il est possible de blacklister certains sites, régies, contextes pour gagner en performance (1) ou encore protéger sa marque (2).
Exemple : Vous représentez une marque de luxe. Vous n’avez certainement pas envie de retrouver votre marque sur des articles qui parle de l’exploitation et du génocide des Ouïghours – même si vous n’êtes pas impliqués dans cette affaire.
4. Mesure des performances des campagnes publicitaires
Bien que différentes régulations mettent à mal depuis un moment le tracking publicitaire (RGPD, App Tracking Transparency, blocage des cookies tiers par défaut, etc.), la publicité programmatique apporte tout de même une plus grande transparence versus le modèle gré à gré. Il est possible de suivre l’évolution des impressions, clics, vues de vidéos en temps réel – pour chaque publicité.
Et contrairement aux réseaux sociaux, le programmatique nous permet d’avoir des données beaucoup plus précises au sujet de la visibilité des annonces – notamment à l’aide d’outils tiers qui limitent les conflits d’intérêts.
Pour info, une pub est “vue” lorsqu’elle s’affiche pendant au moins 1 sec et que 50% des pixels sont affichés à l’écran – selon les standards de la publicité édités par l’Interactive Advertising Bureau (IAB).
Ces metrics ne sont pas communiquées par les réseaux sociaux puisqu’on suppose qu’elles ne seraient pas en leur faveur. Souvenez-vous à quelle vitesse vous scrollez les contenus sur Facebook ou Instagram ? 😉
5- Capacités d’optimisation avancées via des algorithmes
Il est aujourd’hui possible d’optimiser sur une cinquantaine de variables en programmatique. Vous imaginez donc qu’il est impossible de toutes les traiter manuellement. L’intervention humaine est évidemment limitée par le temps mais aussi par sa capacité d’analyse et d’exécution. C’est pourquoi les plateformes que nous utilisons ont tous des algorithmes qui – lorsqu’ils sont bien cadrés – font ce travail pour nous.
Bon, voilà tout pour la partie théorique ! Voyons maintenant ce qui est possible de vraiment faire en programmatique.
Sur quels leviers acheter et diffuser ?
Bon, je ne vous mens pas en disant les clients s’en fiche un peu de savoir comment toute cette logistique fonctionne. Open auction via un système d’enchères (RTB) ou en programmatique direct ? Peu importe : le discours est souvent trop complexe et pas vraiment orienté “valeur”.
D’ailleurs, on s’est très régulièrement posé la question – chez Klox – de savoir si nous devions parler de programmatique ou pas dans nos échanges avec eux.
Ce qui les intéresse est de savoir quoi diffuser ? où diffuser ? et pourquoi ?
On va ici se concentrer sur les environnements sur lesquels nous pouvons diffuser via programmatique. Nous pourrions parler des stratégies mais cela mériterait un article à part entière et de le décliner en fonction des cas d’usage et des industries.
1. Programmatique TV
Le 6 juin 2020, un décret sur la pub annonce que la publicité sur les téléviseurs peut être personnalisée en fonction de différents critères comme la localisation du foyer.
C’est une énorme avancée notamment pour les acteurs locaux – qui vont enfin pouvoir intégrer ce levier dans leur plan média. Et plus globalement, cette réforme va permettre d’avoir un ciblage beaucoup plus fin et donc plus cohérent pour de nombreux annonceurs qui ne sont pas dans le mass market.
On pensait alors que 2021 allait être la bonne année mais les négociations entre opérateurs télécoms et régies TV ont pris beaucoup plus de temps que prévu. On devrait voir un déploiement mis à l’échelle dès cette année.
Mais dans la pub digitale, le programmatique TV ne se résume pas qu’au support “téléviseur”. On décline quatre types d’activation différents : deux pour du replay, deux autres pour du live.
IPTV. Diffusion sur des programmes TV en replay sur une télévision connectée (Connected TV). Les opérateurs télécoms ici sont les distributeurs via leur box internet.
TV Adressable, ou encore Adressable TV. Diffusion sur des programmes TV mais cette fois-ci sur du direct.
Catch-up. Diffusion sur des programmes en replay et sur le web : Desktop, Mobile ou Tablette.
Ad Stitching / Ad-Switching : Diffusion sur des programmes en direct sur l’environnement web.
Vous avez compris : si vous regardez Les Anges de la Téléréalité (par exemple… 👀) dans votre chambre et que vos parents aussi mais en bas dans le salon – vous n’aurez probablement plus la même publicité.
Vous pouvez prendre l’exemple de BFM Business si vous préférez.
Capacités de ciblage
- Localisation du foyer allant jusqu’à l’adresse
- Habitude de consommation
- Contexte des contenus des chaînes de télévision
- Critère sociodémographique (âge, sexe, profil de famille, CSP…)
- Plage horaire
- CRM Onboarding. C’est-à-dire la possibilité d’uploader sa base CRM pour les recibler sur l’environnement TV.
Si vous souhaitez creuser le sujet de la “Connected TV”, je vous conseille de lire l’article que nous avons rédigé fin 2021.
2. Programmatique Audio
Autre grosse tendance pour 2022 – étroitement liée aux nouveaux usages. La consommation de podcasts a particulièrement explosé cette année et de plus en plus de créateurs s’ouvrent au programmatique pour monétiser leurs contenus.
Contrairement aux univers web ou applicatif – qui ont été marqués par une recherche de profits à tout prix du côté des éditeurs, l’environnement audio reste très encadré notamment pour respecter l’expérience utilisateur. Là est tout l’intérêt. Les pubs étant mieux intégrées, elles sont d’emblée plus acceptées par l’auditeur et mieux mémorisée.
Webradios, podcasts, plateformes de streaming… Les opportunités de toucher vos audiences sont nombreuses.
Capacités de ciblage
- Genre & Tranche d’âge
- Catégorie de contenus
- Géolocalisation
- Genre musical
- Playlists
- Humeur (Mood)
- Artistes similaires.
Vous pouvez accéder facilement à tous ces inventaires via les DSP. Spotify a également récemment rendu public à tous les annonceurs sa plateforme d’ads.
Pour plus d’info sur ce levier, vous pouvez consulter cet article.
3. Digital Out of Home (DOOH)
Avec le programmatique TV, le DOOH est probablement le levier marketing et publicitaire qui fait le plus parler de lui auprès des annonceurs et des agences depuis 2021.
Ce marché arrive à maturité et va très probablement exploser en France en 2022. Q4 2021, JCDeceaux annonçait avoir branché tout son parc de panneaux digitaux (2500 en France) au programmatique. Cette communication a créé un gros phénomène d’urgence chez les concurrents. D’ici mi 2022, c’est l’intégralité des écrans premiums qui sera accessible en programmatique.
Jusqu’à présent, l’affichage extérieur – qu’il soit papier ou digital – a toujours été catégorisé comme un levier 100% branding. Difficile de créer de l’engagement avec la publicité ou encore de mesurer l’impact de la campagne sur les ventes.
Mais avec le pass vaccinal et l’application TousAntiCovid, la crise a été un véritable moteur dans la démocratisation du QR Code – jusqu’ici encore très peu ancré dans nos habitudes. Il est aussi de plus en plus utilisé pour le paiement – notamment en restaurant (poke sundayapp.com).
Les cas d’usage se multiplient et l’utilisation du QR devient un réflexe pour les Français. Il serait dommage de ne pas en profiter pour des activations DOOH. La créativité n’a ici aucune limite !
Je vous laisse apprécier cette belle campagne menée par Canal+ qui offrait aux voyageurs du contenu gratuit à ceux dont les vols étaient en retard depuis Genève.
Avantages face au print
- Plus de flexibilité et zéro engagement
- Gain de temps
- Coût plus avantageux
- Créas dynamiques en fonction de données extérieures (météo par exemple)
- Transparence & Reporting en temps réel.
Pour plus d’info sur le DOOH -> DOOH – Un marché qui arrive à maturité pour 2022
4. Consoles & In-Game Advertising
Avec les différents confinements, les gens ont dû trouver des moyens de passer le temps, de nouveaux moyens de se divertir (ou de canaliser leurs enfants 😉). Les jeux vidéo se sont avérés être très efficaces pour cela !
En 2021, le marché du gaming pèse autant que la musique et le cinéma réunis. Et cette statistique intéresse forcément l’industrie de la publicité.
Globalement, le mot gaming fait aujourd’hui référence à plusieurs branches :
- Les jeux mobiles
- Les jeux vidéo sur console et PC
- Les consoles et PC – qui sont aujourd’hui des médias
- Les plateformes de streaming comme Twitch
- Le Esport
Nous allons ici nous focaliser sur la pub sur consoles et sur l’In-Game Advertising, c’est-à-dire la publicité diffusée au sein des jeux vidéo pour PC ou consoles.
Peu d’annonceurs sont encore présents sur ce canal – ce qui fait de lui un levier créatif où le taux d’engagement et l’impact sur la mémorisation des pubs sont très élevés.
L’environnement est également très contrôlé. La fraude publicitaire est quasi inexistante.
Cela dit, nous avons ici affaire à une audience reconnue pour être pro-adblock. Il est donc capital pour l’annonceur de s’adapter à l’environnement et de proposer un message qui correspond aux codes des gamers.
Voici un exemple en image d’une campagne effectuée par Deliveroo sur Xbox.
Outre la publicité sur jeux mobile, il est possible de diffuser à l’intérieur-même des jeux vidéo. Voici une vidéo sur l’intégration de publicité dans le jeu TrackMania.
Voici une vidéo commerciale de la régie Anzu spécialisée dans l’In-Game Advertising. Elle vous donnera un très bel aperçu de ce qu’il est déjà possible de faire.
What’s next ? De nombreux studios et régies publicitaires parient déjà sur l’avenir et voient demain de la publicité intégrée dans des environnements virtuels. #Metaverse
Notre dernier article sur le sujet : In-Game Advertising : un virage à ne pas manquer.
5. Sites pornographiques
Eh oui… Eux aussi sont connectés à des régies publicitaires. En même temps, ces environnements sont de véritables médias avec un trafic monstrueux – n’en déplaisent à certains.
À titre d’information, nous retrouvons 5 sites catégorisés “Adultes” dans le Top 50 Monde des sites les plus visités en 2021. Cinq pour la France également.
La publicité répond à la loi du marché : l’offre et la demande. Je vous laisse alors imaginer les prix au CPM (Coût par Mille impressions) 😉
Nous avons pu accompagner des artistes comme Seth Gheko ou encore Therapie Taxi. La preuve en image ! … Les preuves du succès en image je veux dire.
Et juste pour le plaisir… Je mets ça là.
6. Résumé en image des leviers programmatiques
Vous observerez que j’ai tout de même inclus les réseaux sociaux dans cette catégorisation. Au final, le fonctionnement reste similaire au programmatique. Ce sont juste des enclos fermés qui ne s’intègrent pas vraiment dans le concept d’Open Web.
Conclusion
La bonne compréhension de la publicité programmatique vous permettra de mieux répondre à une question que les annonceurs se posent : Dois-je internaliser mes achats médias ou non ? Ou peut-être moins catégoriquement : Qu’est-ce que je dois internaliser ?
L’agence saura vous accompagner dans la stratégie marketing et dans la construction d’un plan média diversifié, adapté et créatif. Alors que l’annonceur peut légitimement se poser la question de savoir s’il faut externaliser des activations fréquentes, comprises et globalement maîtrisées. C’est tout un calcul de coût temps passé + coût RH + coût outils vs. performance qu’il faut effectuer.
Que vous passiez par une agence ou que vous en internalisiez une partie : l’open web (aka le programmatique) vous permet d’accéder très rapidement à des environnements qui étaient autrefois réservés qu’aux gros annonceurs en raison des minimums budgétaires et des coûts d’achat.
Le programmatique vous permettra également de diversifier vos activations médias et d’être moins dépendants des GAFA – pour des performances tout aussi intéressantes et pour un meilleur contrôle.