En tant que business angel et CEO d’une startup bootstrap (Fleet), avec le contexte actuel, il m’arrive souvent d’échanger avec des entrepreneurs autour de la problématique suivante : Comment allonger son runway ?
Comme le conseille YC dans ce mail à destination de son portfolio, “startups should plan for the worst”. Les faibles performances des entreprises techs côtées impliquent davantage de difficultés pour les fonds à lever des véhicules d’investissement et davantage de garanties demandées par les limited partners. De ce fait, même les meilleurs fonds de VC réduisent leurs volumes d’investissement et portent davantage d’attention sur les metrics et notamment sur les finances des startups.
Parmi ces critères l’un des plus observés est le runway : c’est-à-dire le nombre de mois pendant lesquels une entreprise peut opérer en consommant son cash disponible, avant de devenir rentable (Default alive – comme le recommande Paul Graham) ou d’effectuer une nouvelle levée de fonds. C’est un élément clé pour préparer ses budgets (marketing…) et anticiper ses prochaines levées de fonds.
Pour le calculer il suffit donc de diviser le cash disponible en banque par les dépenses effectuées mensuellement. Ainsi, plus une entreprise “burn du cash” plus le runway est faible et plus l’entreprise devra lever des fonds rapidement. Avec le contexte économique et les difficultés pour effectuer de nouvelles levées de fonds il est donc important de tout mettre en œuvre afin d’allonger la durée de son runway.
Aujourd’hui, les startups se retrouvent face à différents scénarios, comme le présente ce graphique.
Mais comment procéder?
Selon moi, il est nécessaire d’appliquer plusieurs principes :
1 – Se refocus sur son core business
Tout d’abord il est important de se focus sur son core business, sa principale proposition de valeur. L’objectif ici est de concentrer au maximum vos équipes sur la croissance de votre business et de stopper toutes les distractions potentielles. Ainsi, si vous avez des projets qui sont pour vous des “Paris”, des projets à l’issue très incertaine, pour lesquels vous avez peu de certitudes quant aux résultats obtenus, il est recommandé de les stopper.
Si vous lancez des produits additionnels, ouvrez de nouveaux pays, et avez peu ou pas de résultats rapidement, il est recommandé de les arrêter.
Sunday a par exemple fermé plusieurs marchés dont l’Espagne afin de se focus sur la France et les Etats-Unis.
Ainsi, ce focus vous permet de diminuer les dépenses sans réel retour sur investissement, pousser votre croissance et votre chiffre d’affaires, et ainsi allonger votre runway
II – Faire très attention à ses fondamentaux
Un autre principe à adopter est de porter une grande attention à ses fondamentaux, ses units economics (CAC, churn rate, gross margin, marketing & Sales ROI) et son cash flow. Mesurez-les et trackez les avec attention. Ces données permettent ensuite de mettre en place des axes d’amélioration, prendre les bonnes décisions et ainsi étendre son runway. Par exemple, si un sales vous coûte plus qu’il ne vous rapporte, il faudrait peut-être éviter d’en recruter davantage pour le moment.
Des outils de gestion de trésorerie comme Agicap par exemple vous permettent aussi d’avoir une projection sur le moyen et long terme de votre trésorerie.
Étudiez vos cash flows en détail : délais de paiements, rapidité d’encaissement, etc. C’est une base pour ensuite négocier des conditions favorables avec vos fournisseurs. Vous les payez sous 2 semaines, demandez 1 mois, vous les payez sous 1 mois ? Demandez-en 2.
Cherchez aussi à être payé par vos clients le plus tôt possible. Vous pouvez par exemple demander à vos clients de vous payez 50% lorsque votre service est délivré, votre produit livré et 50% dans un second temps.
Je vous recommande d’ailleurs le bouquin “Buy Low, Sell High, Collect Early and Pay Late” qui détaille bien ces principes financiers.
Ces actions permettent d’améliorer votre BFR, d’avoir davantage de trésorerie et ainsi d’allonger votre runway.
III – Stopper ou décaler les investissements non essentiels
Étudiez en détail votre P&L et vos sources de dépenses. Identifiez les dépenses prioritaires avec un impact direct sur son core business. Cette priorisation permet de diminuer sensiblement les dépenses moins importantes.
Vous identifierez par exemple les logiciels très peu utilisés ou non optimisés.
Votre CRM, Hubspot par exemple a un coût très important à chèque nouvelle licence, veillez donc à avoir seulement le nombre de licences suffisantes.
De plus, ce n’est par exemple pas le meilleur moment pour changer de bureau avec de gros travaux et un important dépôt de garantie (Capex) si vous avez déjà une solution clé en main (location de bureaux, coworking..).
Étalez vos dépenses dans le temps, en transformant les capex en opex : par exemple en louant son matériel informatique comme le propose Fleet plutôt qu’en mobilisant beaucoup de cash en capex pour l’acheter. Ces leviers permettent d’avoir davantage de cash en banque et ainsi d’améliorer son runway.
Ce graphique de Sequoia est un autre exemple de mapping de ses dépenses qui permet de rapidement identifier ses dépenses moins importantes.
Car n’oubliez pas revenue is vanity, profit is sanity, but cash is king 😉