Le métier de Growth Hacker n’existe pas.
Cassons un mythe pour commencer, Growth Hacker est un buzzword omniprésent dans l’écosystème tech, mais ce n’est pas un métier.
Pire encore, ce terme est souvent utilisé pour désigner un “mouton à 5 pattes”, un “pirate” qui maîtrise beaucoup de sujets (tech, sales, marketing), capable de générer la croissance de l’entreprise à lui seul et avec peu de ressources.
C’est faux, ça n’existe pas.
Pourtant le Growth lui, existe bien. Mais il reste un sujet flou pour beaucoup d’entreprises et de talents.
Derrière le mot Growth se cachent en fait différentes missions et tout autant de métiers, des métiers d’avenir, puisque ces profils sont aujourd’hui parmi les plus recherchés de l’écosystème startup.
Malheureusement, on constate encore un vrai manque de compréhension autour du Growth et de ses métiers : les différents scopes, les softs et hard skills nécessaires…
Voici notre analyse Growth.Talent des différents métiers du Growth, expliqués et illustrés avec des exemples de profils et d’équipes de l’écosystème.
Pour commencer, posons une définition de ce qu’est le Growth : c’est simplement générer la croissance d’une entreprise à l’aide de différents leviers : l’acquisition de clients, l’optimisation des parcours clients, l’augmentation du revenu… ou encore l’optimisation du produit, lorsque c’est applicable (formulaires, upsell..).
Ensuite, c’est avant tout un état d’esprit : celui de tester, d’itérer, de trouver des idées, d’utiliser des méthodes à la fois techniques, ciblées, centrées autour de la data… Toujours dans ce but de générer de la croissance.
Quand on fait du Growth, on ne sait pas ce qui va marcher, on part d’hypothèses que l’on doit tester d’abord avant de déployer à plus grande échelle et de manière automatisée (= le scale).
Et c’est ce qui rend cette approche unique. Une fois les hypothèses établies, on crée une équipe d’experts qui se concentrent sur la croissance – chacun avec son domaine d’expertise. Là où une équipe marketing par exemple gère des projets, avec une orientation long terme et des membres de l’équipe qui sont très proches dans leurs missions et leurs méthodes de travail.
Dans quel périmètre est-ce que le Growth peut intervenir ?
Pour qu’il y ait un périmètre Growth, il faut avoir des choses à tester, une stratégie à mettre en place (souvent sous forme de sprints). Les leviers cités plus haut constituent un cycle, d’acquisition ou de customer journey (modèle AAARRR, GrowthLoop…) construit autour de l’acquisition, l’activation, la rétention ou encore l’engagement du prospect.
L’objectif du Growth est alors d’améliorer une ou plusieurs étapes de ce cycle, ce qui génère la croissance.
On va donc chercher à créer une équipe d’experts qui imaginent puis mènent des tests à différents niveaux de ce cycle (sur une cible, un canal d’acquisition, un parcours d’onboarding…) et via différents outils procédés : la publicité, la data analyse, la prospection automatisée, l’implémentation d’outils, le code… Vous l’aurez compris, nos 7 métiers sont là!
Les étapes de notre cycle nous donnent les domaines/missions, qui nous donnent ensuite les métiers. Plutôt simple, non ?
Les métiers 🙋♂️
Il est possible de répartir les métiers du Growth dans 7 principales catégories, celles que l’on retrouve dans la plupart des entreprises ayant une équipe Growth. Mais il faut savoir que le scope Growth est lié à beaucoup de facteurs qui varient fortement d’une entreprise à l’autre, et la liste des métiers est sûrement plus longue.
Il faut aussi savoir qu’il n’est pas rare de voir des profils Growth intervenir sur plusieurs métiers, car la maturité de l’entreprise est un déterminant clé dans le rôle que va jouer le profil Growth : plus l’entreprise est jeune et la stratégie Growth naissante, plus le profil sera généraliste et polyvalent – c’est-à-dire capable d’intervenir sur différents canaux d’acquisition.
À l’inverse, au fil de la croissance de l’entreprise, on cherchera à recruter des profils plus spécialistes d’un métier en particulier, experts d’un canal d’acquisition.
Growth Outbound 🚀
En collaborant avec les équipes commerciales, le profil outbound génère des opportunités qualifiées que les commerciaux iront ensuite convertir en clients. Dans les entreprises en B2B, c’est souvent le premier profil Growth recruté : il est à l’origine d’une stratégie Growth, et c’est le profil le plus populaire aujourd’hui.
Il faut définir une cible, identifier les entreprises à contacter, et les qualifier via des campagnes mails personnalisées. Une entreprise est qualifiée si elle a montré de l’intérêt pour le produit, par exemple avec une demande de démonstration.
Au sein de l’équipe Growth de Spendesk – très axée sur l’outbound, Louis envoyait des campagnes automatisées et personnalisées, en se basant sur les offres d’emploi publiées par les entreprises cibles de Spendesk.
Growth Inbound 📩
Il n’y a que deux manières d’acquérir des clients : les contacter (outbound) ou les faire venir à nous. L’inbound, c’est faire en sorte d’être visible pour attirer notre cible sur notre site ou notre produit, via de nombreuses méthodes.
Créer du contenu, expliquer son produit, éduquer sur son problème pour être visible. Le but étant de générer du traffic puis de capturer des emails et des informations précieuses sur les prospects pour augmenter les chances de conversion. Ce levier est puissant, car c’est une méthode gratuite et durable, notamment pour le SEO.
En arrivant chez Stoïk, Leslie a pour mission d’augmenter le traffic organique du site internet. Son scope s’articule principalement autour de la création du blog pour booster le SEO, le lancement d’une newsletter ou encore la création de landing page. Chez Stoïk, le rôle de l’inbound est d’autant plus puissant car c’est un secteur complexe qui nécessite beaucoup de contenu pour éduquer la cible.
Traffic Manager 🤑
Parce que le contenu ne suffit parfois toujours pas, les moteurs de recherches ou les réseaux sociaux sont également des leviers puissants pour faire de d’acquisition payante : la précision des algorithmes pour cibler des nouvelles audiences rend ces canaux particulièrement efficaces. Leur performance est en revanche dépendante de l’investissement.
Définir sa cible puis dépenser un budget en publicité pour améliorer sa visibilité – et donc le nombre d’opportunités. C’est le rôle du traffic manager, qui est parfois amené à gérer des budgets très importants (jusqu’à des centaines de milliers d’€!) ou à collaborer avec une agence externe en charge de l’acquisition payante. C’est aussi et surtout une démarche data driven puisque l’analyse des données est une partie très importante du scope de traffic manager.
Au cours des deux dernières années chez Gorgias, Maxime a eu pour seule mission de générer des leads via différents canaux d’acquisition. Très présent sur Google et Facebook Ads, il a ainsi créé de nombreuses landing pages, géré les campagnes et les budgets. Arrivé premier traffic manager, il manage aujourd’hui une équipe de 2 personnes et un budget de plusieurs dizaines de milliers d’euros.
Demand Generation 👑
Tous les scopes du Growth sont très spécifiques et demandent un management très poussé de la stratégie. Ensembles, les différents canaux d’acquisition (et donc métiers) constituent la Demand Generation. Le rôle du Head of Demand Generation, c’est de manager tous ces canaux, et donc l’équipe Growth. C’est le rôle le plus senior en Growth et également le plus stratégique.
Le Head of Demand Generaion (=Head of Growth), doit être un profil complet capable d’abord de comprendre et de maîtriser les différents canaux d’acquisition, de manager une équipe de spécialistes, et surtout de définir et d’exécuter la stratégie d’acquisition globale pour mieux tracker, analyser, et convertir les prospects. C’est également un relais important de l’équipe auprès des autres équipes : sales, data, produit…
Lorsqu’elle a rejoint Swile, Ana avait deux objectifs : celui d’abord de manager les équipes Growth mais surtout de définir la stratégie globale d’acquisition de Swile, avec des canaux à la fois inbound, outbound et d’acquisition payante. Un véritable rôle 360 au cœur de l’équipe revenue chez Swile.
Product Growth 📱
Augmenter son nombre de prospects est souvent synonyme de croissance, mais améliorer son produit l’est aussi! C’est le meilleur moyen de comprendre son utilisateur et d’identifier des améliorations qui boosteront son utilisation, et c’est justement le rôle du product Growth.
L’utilisation du produit fait partie intégrante du cycle d’acquisition. En se basant des données et en analysant l’utilisation du produit, le product Growth permet ainsi d’agir sur l’ensemble du cycle en : parlant de son produit, identifiant de nouveaux canaux, de nouvelles cibles, de nouvelles fonctionnalités… Un rôle central pour une entreprise produit.
Arrivé en alternance et aujourd’hui en charge de l’équipe Product Growth dans l’application mobile B2C Bling, Louis a mis en place l’ensemble de l’infrastructure de data et d’analytics du produit, permettant des analyses très poussées de son utilisation. Une fois l’infrastructure en place, sa mission est de lancer des campagnes (email, notification, ads) pour améliorer une étape du cycle : acquisition, recommandation, retention…
Growth Ops ⚙️
Pour qu’une machine Growth tourne et génère de la croissance, il faut de nombreux processus, des outils, de la data… pour la supporter. C’est dans ce périmètre que va intervenir le profil Ops, un profil à la fois technique, analytique et organisé.
La démarche Growth basée sur les tests et itérations demande un niveau élevé d’organisation et de process, que ce soit sur le CRM, sur la data analyse ou les outils utilisés. Le rôle de l’Ops sera donc de s’assurer la bonne exécution des projets autour de ces trois piliers.
Comme la plupart des entreprises qui recrutent des profils Growth, Gorgias est un SAAS B2B avec beaucoup de sales et des processus complexes. Le rôle Axelle est de connecter les différentes sources de données et les outils pour s’assurer que les autres personnes travaillant dans le business (Sales, Marketing) ne soit jamais bloquées dans leurs missions.
Growth Engineer 👨💻
C’est le profil le plus technique de la liste, un développeur rattaché à une équipe Growth et capable de travailler sur le produit, sur la data.. Ils peuvent avoir un scope très varié selon leur formation et leur expérience, comme l’avait détaillé Aurélien, ancien Lead Data Engineer de Spendesk.
Le scope du Growth Engineer peut s’articuler autour de 3 piliers :
- Front End: Travailler sur le website pour s’assurer de sa performance et de la conversion, il peut aussi créer de nouvelles pages ou formulaires.
- Back End: S’assurer que la bonne Data soit au bon endroit et au bon moment, très proche des équipes data, il fait le lien entre les équipes business et les bases de données.
- Outils Internes et scraping: En collaborant avec les équipes Sales et Marketing, il s’assure que les données soient correctement collectées en créant des outils internes (CRM, Backoffice…)
Avec d’importants besoins sur la partie scraping et data analyse, le rôle d’Antoine chez Libeo est de s’assurer que la donnée remontée dans le CRM à destination des sales soit la bonne. Il travaille également sur l’ensemble de la conversion du site internet. Il a aussi créé une extension Chrome pour les équipes Sales.
En résumé
Les métiers du Growth sont nombreux et les missions peuvent varier selon la maturité de l’entreprise, le cycle de vente, le secteur d’activité… Ce qu’il faut retenir, c’est que l’intitulé de poste importe peu, il faut surtout s’intéresser au périmètre du job (=scope) : la plupart du temps, on ne distingue pas ces 7 différents métiers sur les sites d’emploi, il faut bien lire l’offre et poser les bonnes questions pour comprendre à quel métier correspondent les missions du job!
Car encore aujourd’hui, les descriptions sont larges et floues et ne permettent pas au talent de se projeter.
Par exemple, analyser les KPI’s du job (données sur lesquelles la performance sera évaluée) est un bon indicateur pour comprendre quels sont les canaux d’acquisition, et donc le métier.
Growth is all about the team 🤜🤛
Il ne faut pas oublier que le Growth, c’est avant tout une équipe. Une personne seule ne pourra jamais gérer l’ensemble de l’acquisition d’une entreprise sur le long terme.
C’est donc pour cela qu’un profil généraliste sera souvent le premier profil Growth – pour mettre en place la stratégie et tester des premiers canaux, avant d’être rejoint par des spécialistes pour manager des canaux précis, à plus grande échelle, et constituer l’équipe.
Néanmoins, une stratégie d’acquisition – et donc de recrutement, sera toujours basée sur l’une des deux approches fondamentales : l’inbound led et l’outbound led.
C’est ce qui va déterminer les canaux principaux que le profil Growth va devoir tester (généraliste) puis mettre à l’échelle (spécialiste) lorsqu’une équipe sera constituée.
Prenons l’exemple de deux SAAS de notre écosystème ayant récemment recruté leur premier profil Growth :
- Qobra est un outil de calcul et de gestion des primes pour les équipes commerciales et a fait le choix d’une stratégie d’acquisition autour de l’outbound. Fraîchement arrivé, Simon va donc mettre en place une stack complexe et puissante permettant de structurer des campagnes d’outbound qui créent un pipeline et qui convertissent, avant d’être épaulé par des profils davantage techniques (ops, data), pour perfectionner la stratégie et/ou le produit.
Dans un second temps, la stratégie sera complétée par le volet Inbound, puisque Qobra prévoit de recruter des profils brand et content. - À l’inverse, Jump, plateforme d’accompagnement des indépendants, a une forte traction depuis l’arrivée de Grégoire qui a concentré la stratégie d’acquisition autour du contenu : Linkedin, articles… Dans un premier temps, Jump va donc constituer un pôle acquisition autour de Grégoire avec un profil expert en acquisition payante et un en SEO, et pourra dans le futur élargir le périmètre avec un profil plus technique et un pôle Outbound/Ops.
La constitution d’une Growth Team chez Qobra et Jump est résumée dans le schéma ci-dessous :
Ces deux SAAS vont ainsi se développer autour de l’inbound ou de l’outbound, en recrutant progressivement des profils spécialistes dans ces canaux (SEO, content / Ops, Outbound …).
Mais ça ne suffit pas pour en faire une team Growth complète! Tout l’enjeu sera donc d’élargir le périmètre de l’équipe en créant un second pôle – opposé, et ainsi progressivement adresser tous les canaux. C’est le chemin qui mène à une Growth Team.
Même si ce n’est pas une vérité générale, on retrouve le cycle de Jump dans la plupart des entreprises B2C, qui structurent leur acquisition d’abord autour du contenu et de l’acquisition payante avant de développer la data et les opérations – l’outbound n’étant que rarement applicable en B2C.