Après avoir accompagné des dizaines de PME dans le pilotage de leur activité pendant près d’une dizaine d’années,un problème revenait systématiquement : les indicateurs de performance suivis par les différentes équipes (commerciales, marketing, finance, RH, etc.) étaient trop souvent basés sur des données sources hétérogènes les rendant difficilement exploitables. Ce qui entraînait de multiples inefficiences : difficultés de collaboration, temps considérable perdu pour construire ces indicateurs, risques d’erreurs élevés, etc.

Mais alors, comment collecter, agréger et structurer des données homogènes et exploitables ? Comment construire des indicateurs de performance fiables ? Comment aligner l’ensemble des équipes sur des objectifs communs ?

Depuis le lancement de Fincome, nous échangeons régulièrement avec les C-Levels

de SaaS pour comprendre leurs principaux enjeux. Sans surprise, ils sont nombreux à rencontrer des difficultés similaires. Voici une synthèse de leurs retours.

Insights tirés de l’expérience de plus de 1 000 équipes SaaS

Depuis la création de Fincome, nous avons mené plus de 1 000 entretiens avec des dirigeants d’éditeurs SaaS de toutes tailles, allant de 5 à 500 employés et générant entre 100k€ et 100M€ d’euros de revenus annuels récurrents (ARR). Ces discussions ont impliqué des fondateurs, des directeurs financiers (CFO), des directeurs du revenu (CRO), des responsables des opérations de vente (RevOps), des responsables des ventes et d’autres membres de la direction.

Ces échanges ont révélé une grande disparité dans les pratiques des entreprises SaaS, tant en termes de structure organisationnelle que d’utilisation des données pour piloter leur activité.

L’éventail des outils utilisés sur le cycle « order-to-cash » est large, allant de solutions simples à des suites d’outils avancées pour les entreprises plus matures. L’un des facteurs déterminants pour expliquer les différences de maturité et de niveau de suivi interne est le montant des paniers moyens.

SaaS à paniers moyens faibles (< 750 € – 1 000 €/mois)

Ces éditeurs SaaS ciblent souvent de petites structures comme les TPE et PME, ainsi que des particuliers en B2C. Leur cycle de vente, généralement inférieur à une semaine, s’appuie sur des canaux d’acquisition digitaux tels que :

  • le marketing de contenu ;
  • le référencement naturel ;
  • les partenariats.

Il n’y a généralement pas de décalage entre la date de conclusion d’un nouveau contrat et l’émission de la première facture, ce qui signifie qu’il n’y a pas de différence entre le suivi du MRR facturé et du « Committed » MRR. La simplicité de leur cycle de vente découle de funnels d’acquisition courts, et la complexité réside dans l’onboarding et l’activation des utilisateurs.

Avec des paniers moyens faibles, ces SaaS gèrent souvent un volume élevé de clients assez rapidement. Dans ce contexte, le suivi du churn et de la rétention – par verticale, segment ou région – devient crucial pour accompagner leur croissance.

Ces analyses permettent de :

  1. repérer les tendances business ;
  2. affiner le profil de leur ICP ;
  3. concentrer les efforts et les ressources sur les segments les plus prometteurs. Par exemple ceux avec une forte « willingness-to-pay », une meilleure adoption du produit et une rétention plus élevée.

En raison de leur important volume de données, ces structures adoptent généralement assez tôt des outils dédiés pour suivre leurs indicateurs de performance. En effet, les tableurs comme Excel ou Google Sheets atteignent généralement leurs limites et ne permettent pas, sans un investissement considérable en temps, de tirer les bons insights pour alimenter efficacement les équipes GTM.

Bien que les outils de BI classiques du marché (tels que PowerBI, Tableau, MixPanel ou encore Whaly) puissent représenter un gain de temps, la construction et la maintenance d’indicateurs de performance homogènes entre équipes restent également souvent très chronophages avec ces solutions.

SaaS à paniers moyens élevés (> 1 500 €/mois)

Les éditeurs SaaS de profil type « Enterprise » ciblent quant à eux généralement de grandes entreprises et privilégient l’optimisation de leur funnel de vente. Ils analysent les taux de conversion à chaque étape, avec des cycles de vente généralement plus longs et complexes.

Dans ces structures, on observe souvent un décalage entre la date de signature du contrat et le début de la facturation. Par conséquent, il est crucial de suivre non seulement le MRR ou l’ARR facturé, mais aussi le « Contracted » ARR (l’ARR découlant directement des signatures de contrats, préalablement à la facturation).

Les analyses se concentrent ici sur l’optimisation :

  • de la conversion des ventes ;
  • de la durée des cycles de vente ;
  • des effets prix-volume ;
  • du pricing en fonction de la taille des comptes, de la complexité des problèmes traités et des spécificités des contrats.

Une analyse clé pour ces organisations est de comparer le MRR facturé avec le « Contracted » MRR. Si ces courbes s’écartent, cela indique généralement que les équipes de vente sont plus rapides que les équipes « opérations », ce qui peut justifier un renforcement de ces dernières.
À l’inverse, si les courbes se rapprochent, cela peut signifier que les opérations sont plus efficaces que les ventes (ou que les ventes sont insuffisantes), ce qui pourrait entraîner d’autres décisions stratégiques.

Le forecasting pour ce type d’éditeurs est souvent très détaillé, avec des analyses basées sur un volume plus restreint de clients et intégrant les perspectives de croissance pour chaque client (upsell et expansion). Les dates de reconduction sont particulièrement surveillées par les équipes CSM pour préparer les renouvellements et les upsells, tout comme l’analyse de l’expansion, afin d’évaluer le potentiel de pénétration avancé des comptes les plus stratégiques et le revenu y afférent.

📌In fine, malgré les spécificités de chaque éditeur SaaS, la plupart des organisations font face à un problème récurrent : le manque d’homogénéité des données collectées et la difficulté à maintenir un niveau de qualité constant.

Les défis découlant de données silotées

Des données éparses et mal structurées

Les équipes que nous avons rencontrées ont souvent des difficultés pour collecter les données nécessaires à des analyses business actionnables. Les données, souvent issues de CRM, sont rarement accessibles ou exploitables en raison de leur qualité variable ou leur caractère incomplet ou erroné.

Certaines équipes de data analystes doivent effectuer plusieurs extractions de bases de données de facturation et de paiements pour les fusionner ou les faire communiquer, dans le but de créer une base fiable qui reflète la réalité économique de l’entreprise.

De plus, le manque de granularité des informations oblige souvent les équipes à combiner différentes sources de données incompatibles. Cela rend difficile le calcul précis des indicateurs ou l’établissement de prévisions cohérentes. Par exemple, l’absence de codes articles dans les bases produit complique l’analyse détaillée, nécessitant un travail manuel chronophage pour extraire des insights actionnables.

Les disparités de nomenclature sectorielle entre le CRM et les outils de facturation utilisés par les équipes commerciales entravent également le niveau de granularité de leurs analyses.

Nous avons observé des difficultés similaires chez deux éditeurs SaaS avec lesquels nous avons échangé récemment :

  • La première, une HRtech de 5 M€ d’ARR, peinait à synchroniser les données entre son CRM et ses outils marketing. Cela affectait la mesure de l’efficacité de ses canaux d’acquisition (CAC, LTV/CAC), entraînant des inefficiences et une perte de temps dans la collaboration inter-équipes.

  • La seconde, une Martech de plus de 10 M€ d’ARR, faisait face à des défis liés à la consolidation de données provenant de sources diverses (CRM, outils de facturation, données marketing). Chaque source avait ses propres formats et niveaux de qualité, compliquant la production d’indicateurs fiables et l’alignement des équipes sur des objectifs unifiés.

Cette incompatibilité analytique entraîne un travail long et fastidieux pour réconcilier les données issues de sources variées, via du data cleaning/crunching (extraction, agrégation, homogénéisation, cadrage). Et à ce stade, aucune analyse n’a encore été produite et aucun insight tiré. En somme, nous avons noté que dans beaucoup de cas, le temps consacré à préparer les données est bien plus significatif que celui passé à analyser les indicateurs.

Suivi des KPIs : un enjeu crucial pour les entreprises SaaS

L’analyse des KPIs est le nerf de la guerre pour la croissance des éditeurs SaaS. En comprenant les dynamiques du marché et les moteurs de la croissance future, les éditeurs prennent des décisions plus éclairées pour accélérer leur développement.

Pour obtenir des insights exploitables, il est souvent nécessaire de réaliser des analyses granulaires pour notamment identifier les leviers de la croissance passée et déceler les tendances clés. Parmi les analyses observées, on retrouve :

  • la décomposition de la croissance par driver (prix vs. volume, par exemple) ;
  • l’identification de tendances Produit via la segmentation (produits, plans, ou offres) ;
  • l’analyse des segments en plus forte croissance (industries ou secteurs spécifiques, régions, etc.).

À ce stade, définir le niveau de granularité approprié est crucial pour tirer des enseignements clairs. Ces insights peuvent ensuite être remontés aux équipes business, Go-to-Market, ou CSM, pour orienter les efforts vers les objectifs à atteindre dans les mois ou années qui suivent.

Insights clés tirés de l’analyse des données par les entreprises SaaS

De nombreux éditeurs SaaS s’intéressent de près à la performance comparative de leurs canaux d’acquisition, pour allouer efficacement leurs ressources selon une logique ROIste.

En analysant la top-line et les dépenses d’acquisition, il est possible de déterminer les canaux les plus efficaces. Les KPIs comme le CAC, la payback period, la LTV, et la LTV/CAC permettent de mesurer l’efficience et la pérennité économique de chaque canal. Par exemple, le canal SEO est souvent très performant, car les clients qui visitent le site sont déjà intéressés par le contenu, ce qui peut traduire un niveau d’intentionnalité élevé.

Bien que les insights les plus critiques dépendent souvent des spécificités de l’entreprise, notamment de son modèle de distribution et de son marché, une analyse globale et structurée des données business et financières peut révéler des tendances cachées. Ces tendances peuvent se montrer critiques pour orienter les décisions Go-to-Market et prioriser les canaux d’acquisition.

Sans une analyse suffisamment granulaire, certaines analyses peuvent toutefois s’avérer incomplètes ou inadaptées, laissant de côté des insights essentiels tels que :

Segments prioritaires 

Les segments de marché prioritaires, les géographies à privilégier, les typologies de clients « ICP » ou encore le nombre de salariés de l’entreprise, son volume d’affaires, son modèle économique, etc. sont autant de critères importants pour affiner les analyses. Sans ce degré de finesses, la compréhension des drivers de croissance peut être limitée.

Disparité de l’efficacité des canaux d’acquisition

tous les canaux d’acquisition ne génèrent pas des leads de même qualité. Par exemple, les leads inbound ont généralement une probabilité de conversion bien supérieure aux leads outbound. Ne pas tenir compte de cette différence de qualité peut fortement impacter l’exercice de forecasting.

Impact de la saisonnalité 

le niveau d’acquisition par canal peut également varier en fonction de la saisonnalité. Par exemple, les ventes peuvent être plus élevées pendant les fêtes de fin d’année. La prise en compte de la saisonnalité intra-annuelle est critique pour produire un prévisionnel de revenu et de cash-flow cohérent.

Spécificités sectorielles 

L’efficacité des canaux d’acquisition peut varier d’une industrie à l’autre ou en fonction de la typologie de clients adressés. Par exemple, le SEO peut être plus efficace pour les entreprises B2B, tandis que le SEA peut être plus efficace pour les entreprises B2C. Cette analyse par segment se révèle aussi critique pour tirer des insights exploitables.

Les niveaux de rétention 

Les analyses sont souvent trop focalisées sur l’acquisition de nouveaux clients. Intégrer l’analyse de la rétention dans la détermination de son ICP permet souvent d’ajouter une dimension « confirmatoire » aux analyses découlant de l’acquisition. Cela donne une vision incomplète de la performance globale des canaux d’acquisition.

Pilotage optimisé de la croissance et du reporting

Limiter l’usage de solutions manuelles et chronophages (Excel, Google Sheets…)

De nombreux SaaS utilisent encore des tableurs Excel ou Google Sheets, investissant beaucoup de temps et de ressources dans l’analyse de leurs données et la construction de leurs prévisions. Cependant, ces méthodes ne sont pas évolutives.

Par exemple, la Head of Growth d’une des SaaS que nous avons rencontré récemment passait énormément de temps à effectuer des calculs complexes de LTV et de CAC par canal d’acquisition et par segment d’activité sur des volumes colossaux, se heurtant souvent à des difficultés de visualisation de ces analyses complexes. Dans son cas, la capture de données fiables depuis l’API de Stripe Billing était très compliquée, rendant difficile la jonction avec d’autres bases de données internes.

En automatisant les processus avec un outil dédié, elle a pu éliminer ces calculs manuels. La collecte et la visualisation des métriques complexes sont devenues plus simples, permettant ainsi de tirer des insights clairs et actionnables. Son équipe a gagné un temps considérable. Ils ont pu se concentrer sur d’autres volets de l’acquisition et améliorer la notoriété de la marque au lieu de s’enliser dans le traitement et l’interprétation des données.

Lorsque l’entreprise grandit, les fichiers Excel deviennent souvent limitants. Pour les entreprises à faible panier moyen et à nombre élevé de clients, le volume de données rend difficile la détection de tendances critiques pour la croissance et la rétention. Il devient alors nécessaire d’adopter des outils dédiés pour structurer et analyser ces données.

L’usage des tableurs est courant parmi les organisations que nous avons rencontrées. Même s’il est possible de tirer des insights pertinents depuis Excel, leurs bénéfices dépendent souvent du niveau d’expérience des utilisateurs.

De plus, la collaboration des équipes est souvent impactée par l’usage des tableurs. Le risque d’erreur est plus élevé, ce qui soulève de nombreuses questions et remet souvent en cause les observations et conclusions tirées dans le cadre d’échange inter-équipes.

Choisir les bons outils : « Buy it vs. Build it »

On constate également que les équipes qui construisent leurs stacks en interne y consacrent énormément de ressources, non seulement au départ, mais aussi pour maintenir ces systèmes. Ces tâches sont souvent confiées à des équipes dont ce n’est pas le rôle principal, détournant leur temps des solutions vendues directement aux clients de l’éditeur.

Les dirigeants que nous avons rencontrés arrivent souvent à la conclusion que le choix du « Build it » n’était pas le plus efficient. Ils regrettent fréquemment de ne pas avoir opté plus tôt pour des outils dédiés leur permettant de dédier leurs ressources aux solutions qu’ils vendent.

Auditer et remettre en question les sources de données

Des dashboards d’outils de facturation souvent peu fiables

Certains SaaS nous ont fait part de leurs difficultés à suivre leurs metrics sur les dashboards d’outils de facturation. Ces derniers sont souvent imprécis et peu fiables.

Par exemple, l’un CFO de SaaS avec qui nous avons échangé, générant plus de 7 M€ d’ARR, était confronté à des omissions de facturation et de renouvellement d’abonnement du fait de volumes importants traités. Des dizaines de factures étaient manquantes chaque mois, représentant plusieurs milliers d’euros de MRR laissés sur la table.

En automatisant l’audit de sa facturation avec un outil dédié, il a pu assurer un suivi précis des factures et des renouvellements de contrats, et ainsi réduire drastiquement les pertes de revenus dues à ces omissions.

De nombreuses équipes Finance utilisent des outils de BI comme PowerBI, Looker ou Tableau. Ces solutions sont puissantes et permettent d’aller bien plus loin que les tableurs classiques. Cependant, elles peuvent aussi devenir chronophages et complexes à gérer sans ressources dédiées en interne.

Nos échanges ont révélé que la qualité des données est souvent hétérogène et intrinsèquement liée aux types de solutions de facturation utilisées.

📌 Une analyse précise des KPIs permet non seulement de mesurer la performance passée, mais aussi de piloter efficacement la stratégie future et d’optimiser les ressources pour maximiser la croissance. De nombreux outils de BI disponibles sur le marché sont très puissants et surpassent largement les tableurs Excel. Cependant, ils peuvent aussi devenir chronophages et complexes à gérer sans ressources dédiées.

Quelques conseils pour une meilleure exploitation des données de facturation

Parmi les bonnes pratiques que nous avons observées, voici nos principales recommandations pour faciliter l’exploitation des données de facturation et titrer les insights en découlant :

  1. Privilégier des outils dédiés au « subscription management » : pour les entreprises basées sur un modèle d’abonnement, optez pour des solutions comme Stripe Billing, Chargebee, Hyperline, Zuora ou ProAbono. Ces outils sont spécifiquement conçus pour la gestion des abonnements et offrent une flexibilité et une efficacité bien supérieures à celles des outils de facturation plus généralistes.
  2. Adapter les solutions au modèle économique et à la typologie de pricing : Chargebee, Hyperline et Zuora permettent une gestion très efficiente des modèles de pricing complexes. Ces solutions granulaires sont particulièrement adaptées au « usage-based » pricing.
  3. Éviter les outils de facturation généralistes : De nombreuses solutions de facturation ne répondent pas aux besoins spécifiques des éditeurs SaaS ou des acteurs de l’économie récurrente. La gestion des abonnements, de leur renouvellement et de la facturation est souvent plus complexe qu’il n’y paraît. Cependant, certaines solutions généralistes comme Pennylane peuvent traiter efficacement la gestion d’abonnements simples tout en gérant le cycle complet order-to-cash et les analytics grâce à une API ouverte et de nombreux partenaires.
  4. Intégrer sa solution de billing dans une réflexion globale order-to-cash : Trop d’équipes ne prennent pas en compte la globalité du cycle order-to-cash. La fluidité du processus et son automatisation, qui limitent drastiquement les risques d’omission de facturation ou d’impayé, dépendent directement de la compatibilité et de l’intégration des solutions entre elles.
📌 Les bénéfices des systèmes de facturation varient généralement selon la taille et le modèle de distribution de l’entreprise ainsi que le niveau de complexité du modèle de pricing. Il est donc crucial de choisir des outils adaptés le plus tôt possible pour éviter les écueils associés.

Best practices pour analyser sa performance

Les entreprises les plus performantes que nous avons pu observer sont souvent celles qui ont adopté une approche analytique dès leur création. Elles ont très tôt compris l’importance de piloter leur activité pour atteindre leurs objectifs. Cela leur a permis de mieux analyser leurs performances, de construire des scénarios prévisionnels plus précis et ainsi d’améliorer leurs résultats.

Comme le formule le statisticien William Edwards Deming : « Ce qui ne se mesure pas ne s’améliore pas. »

En effet, sans mesure ni analyse, il n’y a pas de point de référence et donc aucun moyen de progresser. Il devient alors beaucoup plus difficile pour les entreprises de piloter leur activité et de prendre les bonnes décisions.

Analyser finement les performances du modèle de distribution et sa rentabilité est crucial pour bien anticiper les conséquences des multiples facteurs opérationnels qui rentrent en compte. Cela permet de construire des scénarios de croissance précis et d’obtenir des informations exploitables pour optimiser la collaboration entre les équipes et la prise de décisions stratégiques.

Adopter un mindset analytique dès le départ

Dès leur lancement, les éditeurs SaaS les plus performants adoptent une approche data-driven pour suivre de près l’acquisition clients. Pour les SaaS distribuant leur solution en outbound, ils analysent notamment :

  • le volume de contacts établis : nombre de prospects potentiels touchés
  • le taux de réponse aux emails : pourcentage de réponse des prospects (qu’elle soit positive ou négative) aux emails / messages Linkedin envoyés
  • le taux de clics : niveau d’engagement sur les CTA incluent dans les messages
  • le taux de conversion : pourcentage de prospects convertis en clients
  • le taux de retours positifs : pourcentage de prospects intéressés sur le volume global de prospects contactés

Ils suivent également finement le trafic sur leur site internet et sa conversion en leads inbound, ainsi que la performance des différents canaux d’acquisition déployés (marketing digital, référencement, publicité, actions outbound, etc.).

Très tôt, ils analysent également leur base clients pour comprendre le type et le niveau d’usage de la solution. Ils suivent les fonctionnalités les plus utilisées, le nombre de connexions quotidiennes, la typologie des utilisateurs les plus actifs et la fréquence d’activité.

Le NPS (Net Promoter Score) est aussi souvent suivi de près dès le début pour évaluer la satisfaction client et le Product Market Fit (PMF), représentant un bon indicateur pour évaluer si le produit répond bien aux attentes du marché.

📌 Les SaaS performants placent l’acquisition et la satisfaction client au cœur de leur stratégie dès le jour 1. En suivant de près les indicateurs clés et en analysant les données comportementales, ils optimisent en permanence leurs efforts pour attirer, convertir et fidéliser leurs clients.

Comprendre la pérennité du modèle économique dès les premiers mois

Dès les 6 premiers mois de commercialisation, de nombreux indicateurs financiers permettent d’évaluer l’efficience et la pérennité du modèle économique de l’entreprise :

  • panier moyen ou ACV (Annual Contract Value) : revenu moyen généré par une vente auprès d’un compte client ;
  • ASP (Average Selling Price) : prix de vente moyen d’un produit ou service ;
  • LTV (Lifetime Value) : valeur totale générée par un client sur toute sa durée de vie en tant que client de l’entreprise ;
  • CAC (Customer Acquisition Cost) : coût d’acquisition d’un nouveau client (idéalement suivi par canal d’acquisition) ;
  • LTV/CAC : ratio permettant d’évaluer la pérennité d’un modèle économique (le référentiel est généralement de 3x, i.e. la valeur à long-terme d’un client doit être idéalement au moins 3x supérieure au coût engagé pour l’acquérir) ;
  • NRR (Net Retention Rate) : le pourcentage de revenus reconduits d’une période à l’autre hors acquisition de nouveaux clients (i.e. en incluant uniquement l’upsell, le downsell, la réactivation et le churn).

Au-delà de ces indicateurs financiers, les meilleures équipes analysent en détail chaque étape du funnel client pour comprendre finement ce qui fonctionne bien et ce qui est à améliorer. Elles utilisent souvent des frameworks dédiés, comme le funnel AARRR (Acquisition, Activation, Rétention, Revenu, Referral) :

  • Acquisition : comment attirer de nouveaux clients ?
  • Activation : comment inciter les nouveaux clients à utiliser le produit ou le service et l’ensemble des fonctionnalités disponibles ?
  • Rétention : comment fidéliser les clients existants ?
  • Revenu : comment augmenter le revenu par client ?
  • Referral : comment inciter les clients existants à recommander le produit ou service à d’autres ?

Cet ensemble d’indicateurs s’avère particulièrement utile pour mesurer l’efficience des efforts d’acquisition ou du business model et évaluer la stratégie de croissance dès les premiers mois d’activité.

Les éditeurs SaaS qui adoptent cette approche dès le départ peuvent rapidement évaluer les résultats de leurs efforts et ajuster leur stratégie pour maximiser leurs chances de succès. Ces entreprises ajustent leur stack d’outils de manière rapide et appropriée en fonction de leur taille, positionnement, modèle économique et de la complexité de leur cycle d’acquisition/vente.

Auditer régulièrement les données

L’un des enjeux fondamentaux est de collecter des données précises, granulaires et exploitables pour créer une base de travail fiable. La qualité des insights dépend directement de la qualité des données recueillies, d’où l’adage « garbage in, garbage out ». Les équipes les plus performantes que nous avons rencontrées mettent en place des audits réguliers, des processus de contrôle stricts et systématiques pour garantir la fiabilité des indicateurs obtenus.

Une pratique pas si courante

En réalité, c’est souvent à l’approche du premier million d’ARR que les équipes commencent à structurer finement les données collectées pour une meilleure analyse. Le risque d’erreur augmentant significativement avec le volume de données traitées, le besoin d’investir dans des solutions de gestion de données plus robustes se matérialise souvent à ce moment-là. L’approche d’une potentielle série A et l’arrivée de nouveaux investisseurs incitent les équipes à structurer la gestion des données en interne.

Préparer cette transition de manière proactive, dès les débuts, permet souvent de :

  1. lisser la charge de travail des équipes
  2. réduire les risques opérationnels liés aux transitions de stacks d’outils
  3. optimiser le pilotage de l’activité
  4. sécuriser plus facilement et rapidement des sources de financement externes

Constituer un historique exhaustif des revenus et des indicateurs

Disposer d’un historique long-terme des revenus et d’indicateurs de performance permet d’identifier des tendances de fond pour capitaliser dessus.

La compilation d’un historique de données complet permet notamment de :

  • conduire des analyses rétrospectives complètes et fines pour déceler des tendances de segmentation fines et les exploiter au plan opérationnel
  • faciliter la prise de décision relative aux investissements et/ou aux recrutements à venir, en se basant sur une vision fiable de la croissance des revenus
  • établir des prévisions réalistes basées sur des observations historiques fiables

Les entrepreneurs avec lesquels nous avons échangé expriment un besoin croissant de KPIs plus nombreux et de meilleure qualité. Ils cherchent également souvent plus de référentiels pour se situer vis-à-vis de leurs pairs à stade de maturité comparables.

L’identification et la compréhension fine des leviers de croissance représentent des priorités pour la majorité d’entre eux. Ils s’intéressent notamment à l’impact de l’upsell, du cross-sell, aux raisons du churn et aux facteurs de réactivation des anciens clients. L’objectif est d’aller plus loin et de capitaliser sur ces insights pour accélérer.

Cependant, de nombreuses entreprises rencontrent des difficultés à construire des forecasts précis et détaillés, faute de données historiques et de KPIs exploitables. Plus de 80 % des SaaS que nous avons rencontrés ont du mal à construire des prévisions précises.

Par exemple, projeter sa croissance en se basant sur un taux de conversion des leads de 25 % sans un historique de données d’au moins 12 ou 18 mois est extrêmement risqué. Cette rigueur dans la collecte et l’analyse des données historiques est indispensable pour prioriser certains segments de marché ou typologies de clients.

Concevoir des prévisions fiables implique de se baser sur des hypothèses réalistes et cohérentes avec les performances passées. Cela nécessite de disposer d’un historique de données complet et de l’exploiter en veillant à rester MECE (Mutually Exclusive, Collectively Exhaustive).

📌 Constituer un historique exhaustif des revenus et des indicateurs est un pilier essentiel de la croissance pour les entreprises SaaS. Cela permet de prendre des décisions éclairées, d’identifier les leviers de croissance et d’optimiser les performances sur le long terme.

Adopter la bonne approche de forecasting en fonction du modèle économique

Les approches pour construire des scénarios de revenus prévisionnels varient significativement en fonction du modèle économique (SMB ou Enterprise). On retrouve toutefois une base générale indépendante du modèle économique.

Paramètres généraux

  • Distinction base installée vs. new business : la distinction entre la croissance générée sur la base installée et le new business permet de construire un forecast avec un bon niveau de granularité ;
  • Evolutions prix / volume : l’un des drivers de croissance souvent sous-exploité réside dans les augmentations tarifaires qui ont un double impact sur (i) le new business généré auprès de nouveaux clients et (ii) la base de clients existants avec des upsells lors des tacites reconductions ou directement liés à l’expansion au sein de comptes stratégiques ;
  • Enjeux de rétention : la prise en compte du taux de churn historique, idéalement par segment d’activité, type de clients ou encore géographie est critique pour générer des scénarios de croissance fiables.

Modèle SMB (petites et moyennes entreprises)

  • Volumes élevés : les équipes les plus performantes raisonnent par segment et retiennent des hypothèses sur le churn, le nombre de nouveaux abonnés et le panier moyen ;
  • Segmentation des revenus : les drivers de croissance sont affinés par segment de marché, région ou canal d’acquisition (SEO, Ads, Sales, partenariats, etc.). Les équipes peuvent également capitaliser sur des analyses par cohortes pour mieux comprendre les phénomènes d’acquisition et de rétention au fil du temps, pour isoler l’impact de certains facteurs exogènes.

Modèle Enterprise (grandes entreprises)

  • Projections basées sur des indicateurs historiques : la croissance est projetée sur la base d’hypothèses reposant sur la performance historique des équipes commerciales pour acquérir de nouveaux clients. Le paramètre clé qui permet de rationaliser les hypothèses de travail est souvent l’ARR/sales. Il est important également de bien prendre en compte l’effet ramp up des nouvelles recrues (qui n’atteignent leur niveau normatif de performance généralement qu’après plusieurs mois) ;
  • Capitaliser sur un funnel de ventes détaillé : les metrics observées à chaque étape du funnel d’acquisition tirées des analytics du CRM (durée moyenne du cycle de vente, taux de prise de rendez-vous par Sales, volume de leads inbound générés, etc.) permettent de projeter finement les revenus futurs en restant cohérent avec les performances historiques observées.

La structure de coûts est ensuite projetée sur la base des performances historiques. Il est fortement conseillé d’analyser les KPIs permettant de faire des « sanity check » (CAC par canal d’acquisition, new ARR par FTE, panier moyen ou ACV, parts de marché gagnées…) pour s’assurer de l’aspect « réaliste » des projections et de la rentabilité qui en découle.

📌L’approche de construction d’un scénario prévisionnel doit être adaptée au modèle économique de l’entreprise et aux données disponibles. En prenant en compte les spécificités relatives au modèle économique, les éditeurs SaaS peuvent établir des projections plus précises et réalistes, leur permettant de prendre des décisions stratégiques éclairées.

Construire un forecast précis et collaboratif

Intégrer des analyses de sensibilité

L’analyse des revenus et des drivers de croissance est essentielle mais n’est pas suffisante, elle doit être complétée par une structure de coûts détaillée et fiable, tirée de la comptabilité. L’exercice de forecast vise à guider la stratégie et les opérations de l’entreprise en capitalisant sur des insights business issus d’analyses approfondies de la performance historique ainsi que des facteurs de marché. Les équipes les plus avancées intègrent des analyses de sensibilité pour comparer différents scénarios de croissance et se préparer autant que possible aux aléas de la réalité.

Cela permet d’avoir une vision claire de ce qui pourrait se passer si certaines hypothèses varient. Souvent, les éditeurs SaaS que nous avons rencontrés construisent un base case, un downside case et un crash case. Un upside case peut aussi être intégré pour simuler des scénarios intégrant des leviers favorables non-encore définitifs. Il est très utile de pouvoir ajuster facilement un scénario de forecast pour le challenger et le faire évoluer en fonction des indicateurs de performance disponibles les plus fiables et récents.

Collaborer entre équipes

L’exercice de forecast repose souvent sur un travail collaboratif où chaque équipe joue un rôle crucial dans la définition des objectifs de croissance et les ressources nécessaires pour les atteindre. Les équipes les plus performantes impliquent généralement l’ensemble des C-Levels pour établir des prévisionnels complets et fiables, assurant ainsi l’alignement de tous sur les objectifs stratégiques de l’entreprise.

  1. Les équipes Go-to-Market fournissent des informations sur les tendances du marché, identifient les opportunités de croissance, capitalisent sur le pipe de deals existants, et évaluent les performances des membres de l’équipe ainsi que les mouvements de personnel prévus.
  2. Les équipes Customer Success Management (CSM) intègrent le niveau de satisfaction des clients via des scores de santé ou NPS, mesurent le niveau d’usage, d’activation et de stickiness, et évaluent le potentiel d’upsell ou de cross-sell et de churn de la base de clients existante.
  3. Les équipes Finance, quant à elles, revoient et challengent les hypothèses et objectifs transmis par les équipes opérationnelles, analysent la structure de coûts et les cash-flows résultant du P&L historique, et fournissent une synthèse des simulations financières et des enjeux en termes de financements externes nécessaires.

Ce travail collaboratif permet de créer un Business Plan détaillé, alignant la stratégie des efforts Go-to-Market et de l’activité dans son ensemble, et facilitant la communication du cap stratégique aux investisseurs ainsi que l’anticipation des besoins en financement complémentaire.

Les C-Levels d’éditeurs SaaS se retrouvent souvent face à un enchevêtrement de données : dispersées dans divers outils, mal organisées, incomplètes et peu exploitables. Pourtant, l’analyse de ces metrics est cruciale pour piloter l’activité, identifier les drivers de la croissance future et identifier les canaux d’acquisition les plus efficaces, tout en tenant compte des paramètres endogènes et exogènes comme les effets de saisonnalité ou les conditions du marché.

Les solutions existantes présentent souvent des limites dans le pilotage de l’activité et la production de reportings financiers. Les outils manuels, comme les tableurs Excel, deviennent rapidement chronophages et présentent des risques d’erreurs et des limites dans la collaborativité, avec des bénéfices dépendant fortement de la compétence des utilisateurs.

Développer une solution en interne est souvent long et coûteux. Bien que de nombreux outils de BI sur le marché soient très puissants et surpassent largement les tableurs Excel, ils peuvent également devenir complexes et chronophages à gérer sans ressources dédiées, ce qui n’est pas toujours une allocation optimale des ressources.

La qualité des données varie souvent en fonction des outils en place, notamment ceux utilisés pour la facturation. La solution réside souvent dans l’adoption d’outils de « subscription management » adaptés au modèle économique et au type de pricing des éditeurs SaaS.

Les équipes d’éditeurs SaaS les plus performantes que nous avons rencontrées adoptent dès le départ un mindset analytique pour constituer un historique exhaustif des revenus et indicateurs, permettant un suivi précis de leur activité. Elles établissent des prévisions détaillées calibrées en fonction de leur modèle de distribution et impliquent l’ensemble des C-Levels pour les aligner sur des objectifs communs à long terme, focalisant ainsi l’énergie de toute l’équipe dans la même direction.